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passerent en Asie plusieurs siècles après les Phrygiens, & les lydiens, avoient deux tribus, dont l’une portoit le nom de Tectosages & l’autre, celui de[1] Teutoboniaci. Comme j’ai souvent indiqué l’origine de ces dénominations, je crois pouvoir me dispenser d’y revenir dans la suite.

J’ai prouvé ailleurs que les perses appeloit Dieu dans leur langue God, de la même manière que les allemans. Mais comme ce terme de God, est un nom appellatif qui signifie le bon, la question seroit de savoir si le nom propre de Tis, ou de Teut, étoit employé par les perses, comme par tous les autre peuples Celtes pour désigner le Dieu suprême. J’avoue que je n’en ai trouvé jusqu’à présent aucune preuve positive. Je soupçonne seulement que lorsqu’Hérodote dit, que la reine Amestris fit enterrer tout vivans quatorze jeunes seigneurs, comme un sacrifice d’actions de graces au dieu que l’on place sous terre, cet Historien a confondu l’Atès des phrygiens & peut-être des perses, avec l’Adès ou le Pluton des grecs. Au-moins verrons nous tout à l’heure que les romains ont fait une bévue parfaitement semblable.

Il faut repasser présentement en Europe. Les peuples qui demeuroient au Nord du Danube, & que l’on désignoit sous le nom général de scythes, ont été peu connus des anciens. On entrevoit cependant que les scythes donnoient au Dieu suprême le nom de Tay, ou de Tau. 1o. Il paroît, par exemple, par un passage de Théophylacte simocatta, que les turcs vénéroient le feu, l’air, & l’eau ; qu’ils célébroient la terre dans leurs himnes ; mais qu’ils n’adoroient & n’appeloient Dieu que celui qui a fait le ciel & la terre. Dans le chapitre suivant, le même historien remarque[2] que le souverain de la ville de Taugas, s’appelloit Taisan, ce qui signifie en Grec, fils de Dieu. Fan, ou son, signifioit en scythe un fils. Ainsi Tai étoit le nom du Dieu qui a fait le ciel & la terre. Je ne doute pas que les princes turcs ne prissent le nom de Taisan, pour marquer qu’ils tiroient leur origine de ce dieu, & selon les apparences, la vénération que les turcs avoient pour la terre venoit de ce qu’ils lac regardoient comme la mere des vivans. Ces idées s’accordent assez avec ce qu’Hérodote dit du Jupiter des scythes & des perses. Les scythes croyoient, que la terre est la femme de Jupiter. Ils donnoient à Jupiter le même titre que les Phrygiens, descendus des scythes, donnoient à leur Atès. Ils l’appelloient Pappaus. Les perses appelloient Jupiter, toute la voute des cieux, c’est-à-dire, l’ame universelle, qui environne, & qui pénétre toutes les différentes parties du monde. Mais il y a au-reste, dans le récit d’Hérodote plusieurs difficultés. J’en ai déjà indiqué quelques unes, & je toucherai les autres dans la suite de cet article.

2o. La chersonnese cimmerienne, qu’on nomme aujourd’hui la tartarie crimée, étoit appellée par les anciens habitans du pays[3] Taurich, c’est-à-dire, le royaume de Tau, & ces peuples avoient, comme les autres Celtes, des princes du nom de[4] Botis.

3o. Je ne sais si je devine ; mais j’ai beaucoup de penchant à croire que le roi[5] Targitaus, auquel les scythes rapportoient, selon Hérodote, l’origine de leur nation, étoient le dieu même dont je viens de parler, le bon Taus, Tar-Gith-Taus, ou comme les allemands diroient aujourd’hui Der guthe-Taus.

Il ne me reste plus, pour achever l’énumération que j’ai entreprise, que de parler des anciens habitans de l’Italie & de la Grece. Avant qu’il eut passé en Italie des Colonies étrangère, les aborigines, qui reçurent ensuite le nom de romains, adoroient[6] le pere Dis, auquel ils


    fectus. Corn. Nep. in Datame. cap. 2. Thys Paphlagoniæ Rex. Athen. lib. 4. cap. 10. Tisanusa (c’est-à-dire maison de Tis) Cariæ urbs. Pomp. Mel. lib. 2. cap. 16. p. 26. Teuthrania quai Mysi antiquitus tenuere. Plin. H. N. lib. 5. cap. 30. Mystæ Mons Teuthras. Plutarch. de flum. Tom. 2. p. 1161. Stobœus, Serm 242. p. 793.

  1. Plin.  lib. 5. cap, 32. p. 626. Teuthoden, païs de Teut.
  2. Theophyl. Simocatta lib. 7. cap. 9. p. 176.
  3. Chersonesus Taurica. C’est l’origine du nom de Tauri, que les Grecs donnoient aux scythes de cette contrée.
  4. Cotys Rex Bosphori Cimmerii. Arrian. Peripl. Pont. Euxin. p. 130.
  5. Herodot. 4. 5.
  6. Februus est Ditis pater cui eo mense sacrificabatur. Servius ad Virg. Georg. 1. vs. 43. p. 66.

    Sexagenarios de ponte olim dejiciebant, cujus causam Manilius hanc refere, quod qui Romam incoluerint primi Aborigines, hominem sexaginta annorum qui esset, immolare Diti patri quotannis soliti fuerint, quod facere eos destitise adventu Herculis, sed religione postea veteris moris, scirpeas hominum effigies, de ponte in Tiberim vetere more bittere instituisse. Pomp. fest. p. 143.

    Argei fiunt è scirpis, simulacra sunt hominum triginta. En quotannis e ponte sublicio, à sacerdotibus publice jaci solent in Tiberim. Varro de Ling. Lat. lib. 6. p. 75. Edit. Popmœ. Vix ea fatus erat, cum