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Page:Encyclopédie méthodique - Philosophie - T1, p2, C-COU.djvu/8

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Voilà une très-petite partie des principes & des opinions qu’on trouve dans les ouvrages de Campanella sur la physique.

Il est singulier qu’un homme qui se donnoit pour le restaurateur de la philosophie, n’ait pas pris plus de soin de déguiser ses larcins. Il suffit d’avoir une connoissance médiocre des sentimens philosophiques des anciens & des modernes, pour reconnoître tout d’un coup les sources où Campanella a puisé la plupart des idées que nous venons d’exposer. Je ne parle point ici des absurdités qui remplissent les ouvrages de notre Dominicain : sottises pour sottises, il me semble que les anciennes sont aussi bonnes que les modernes ; & il étoit assez inutile d’étourdir le monde savant par des projets de réforme, lorsqu’on n’avoit que des chimeres à proposer. (Voyez Aristotélisme). Cette réflexion de l’abbé Pestré sur la physique de Campanella est très-judicieuse.

Comme le livre où Campanella donne du sentiment aux êtres les plus insensibles fit beaucoup de bruit dans le temps, on sera peut-être bien aise d’en voir ici l’extrait, d’autant plus que cet ouvrage est extrêmement rare. Il est intitulé : de sensu rerum & de magiâ.

Il prétend prouver dans cet ouvrage qu’il y a du sentiment dans tous les corps & dans tous les êtres qui nous paroissent immobiles & insensibles. Les astres, les éléments, les plantes, les cadavres mêmes, tout, selon lui, est sensible dans le monde. Il prétend que les bêtes parlent entre elles, sans quoi leurs sociétés ne pourroient subsister. Il pense que ce sentiment n’est point absurde, puisque les animaux s’entendent les uns, les autres, comme lorsqu’une poule appelle ses poussins. Nous allons rapporter quelques propositions extraites de ce livre, & qui pourront en donner une idée générale.

1. On ne donne point ce qu’on n’a point ; par conséquent tout ce qui est dans un effet, est aussi dans sa cause : or, comme les animaux ont du sentiment, & que le sentiment ne sort point du néant, il faut conclure que les élémens qui sont les principes des animaux, ont aussi du sentiment, donc le ciel & la terre sentent.

2. Le sentiment n’est pas seulement une passion ; mais il est souvent accompagné d’un raisonnement si prompt, qu’il n’est pas possible de s’en appercevoir.

3. La mémoire est un sentiment anticipé : la réminiscence est un sentiment renouvellé dans un sujet semblable.

4. Les bêtes ont de la mémoire & elles raisonnent ; mais les plantes n’ont aucune de ces facultés.

5. Il y a du vuide, mais seulement par violence & non pas naturellement.

6. Le feu est le principe du mouvement dans tous les êtres. Et l’ame motrice est un esprit chaud.

7. Tous les sens sont autant de touchers divers ; mais les sensorium & les manières de sentir sont différens à cause de la nature des organes.

8. Si le sentiment est une passion, & si les élémens & les êtres qui en sont composés ont des passions, tous les êtres ont donc du sentiment.

9. Sans le sentiment, le monde ne seroit qu’un chaos.

10. L’instinct est une impulsion de la nature, laquelle éprouve quelque sentiment : donc ceux qui prétendent que tous les êtres agissent par instinct, doivent par conséquent supposer qu’ils agissent par sentiment ; car ils accordent que tous les êtres naturels agissent pour une fin : il faut donc qu’ils la connoissent cette fin ; donc l’instinct est une impulsion qui suppose de la connoissance dans la nature.

11. Tous les êtres ont horreur du vuide : donc ils ont du sentiment, & on peut regarder le monde comme un animal.

12. Il seroit ridicule de dire que le monde n’a point de sentiment, parce qu’il n’a ni pieds, ni mains, ni nez, ni oreilles, &c. Les mains du monde sont les rayons de lumière ; ses yeux sont les étoiles, & ses pieds ne sont autre chose que la figure ronde qui le rend propre au mouvement.

13. Il paroît, par l’origine des animaux, que l’ame est un esprit subtil, chaud, mobile, propre à recevoir des passions, & par conséquent à sentir.

14. Tous les êtres ont une ame, comme on peut s’en convaincre par les choses qui naissent d’elles-mêmes, & qui ont toujours quelque degré de chaleur.

15. Les choses les plus dures ont un peu de sentiment : les plantes en ont davantage, & les liqueurs encore plus. Le vent & l’air sentent facilement ; mais la lumière & la chaleur sont les êtres qui ont le plus de sentiment, &c.

16. Le monde sent dans toutes ses parties ; mais plus dans l’une, & moins dans l’autre. Comme