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ARC
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À neuf heures & demie du ſoir, du côté du ſud-oueſt, j’obſervai encore des éclairs, de même que pendant une partie de la nuit. Le baromètre étoit à vingt-ſept pouces huit lignes.

D’après tout ce qui a été démontré ſur la cauſe des arcs-en-ciel ſolaires, on pense bien que les arcs-en-ciel lunaires ſont auſſi formés par la réfraction que ſouffrent les rayons de la lune dans les gouttes de pluie qui tombent la nuit. Si on ne les apperçoit qu’à la pleine lune ou aux environs de cette phaſe, c’eſt que dans les autres temps la lumière de cet aſtre eſt trop foible pour frapper la vue après deux réfractions & une réflexion. L’arc-en-ciel lunaire, lorſqu’il eſt bien coloré, a toutes les mêmes couleurs que le ſolaire, excepté qu’elles ſont preſque toujours plus foibles ; principalement à cauſe de la différente intenſité des rayons de la lune, qui, ſelon les expériences & les calculs de M. Bouguer, ſont 300 000 fois moins denſes que ceux du ſoleil. On peut ajouter à cette cauſe celle de la différente diſpoſition du milieu que traverſent les rayons de la lune, car la maſſe d’air, pendant la nuit eſt plus chargée de vapeurs ou de vapeurs plus denſes, qui peuvent quelquefois être telles, qu’il n’y ait point de couleurs.

Arc-en-terre. L’arc-en-terre ne diffère qu’accidentellement de l’arc-en-ciel, & ſeulement par ſa poſition ; celui-ci paroit dans les cieux & celui-là ſur la terre. Mais tous les deux dépendent des mêmes cauſes de la réfraction & de la réflexion des rayons du ſoleil dans des gouttes d’eau, & de la décompoſition de la lumière en ſes couleurs primitives. On obſerve quelquefois dans les prairies ſur les gouttes de pluie ou de roſée, qui y ſont tombées, des arcs-en-ciel renverſés, de cette espèce ; Rohault en fait mention ; j’en ai vu trois ou quatre fois dont les couleurs étoient très-vives, & qui ne différoient preſque pas de celles de l’arc-en-ciel ordinaire.

Les conditions nécessaires pour la formation de ce phénomène ſur la terre, ſont toujours que le ſpectateur doit tourner le dos au ſoleil, & être placé entre le phénomène & cet aſtre, que la ligne qui paſſe par le centre du ſoleil, l’œil de l’obſervateur & le centre de l’arc, doit faire avec les rayons de lumière les mêmes angles dont on a parlé. Auſſi faut-il que le ſpectateur ſoit ſur un lieu élevé, & que le ſoleil ſe ſoit levé depuis quelque temps, ou qu’il ſoit près de ſon coucher. Les différens degrés d’élévation du ſoleil & de l’obſervateur font varier la grandeur de l’arc-en-terre ; on peut même, dans des circonſtances favorables, voir le cercle entier coloré des ſept couleurs priſmatiques.

Arc-en-ciel marin. C’eſt une portion d’anneau ou bande demi circulaire, ornée de couleurs priſmatiques, qu’on apperçoit ſur la ſurface de la mer, dans le temps où le ſoleil eſt à une certaine hauteur au-deſſus de l’horiſon. [ L’arc-en-ciel marin est un phénomène, qui paroit quelquefois lorſque la mer eſt extrêmement tourmentée, & que le vent agitant la ſuperficie des vagues, fait que les rayons du ſoleil qui tombent deſſus, s’y rompent & y peignent les mêmes couleurs que dans les gouttes de pluie ordinaire. M. Bowrzes obſerve dans les tranſactions philoſophiques, que les couleurs de l’arc-en-ciel marin ſont moins vives, moins diſtinctes & de moindre durée que celle de l’arc-en-ciel ordinaire, & qu’on y diſtingue à peine plus de deux couleurs ; ſavoir, du jaune du côté du ſoleil, & un vert pâle du côté oppoſé.

Mais ces arcs sont plus nombreux ; car on en voit ſouvent 20 ou 30 à la fois : ils paroiſſent à midi, & dans une poſition contraire à celle de l’arc-en-ciel, c’eſt-à-dire, renversés ; ce qui est une ſuite néceſſaire de ce que nous avons dit en expliquant les phénomènes de l’arc-en-ciel ſolaire. ]

Si on obſerve ces arcs-en-ciel marins d’un lieu élevé, comme d’un cap, ou du haut des mâts, ils paroiſſent renverſés ; & ſi dans le même temps, ainſi qu’on l’a obſervé quelquefois, un nuage qui paſſe, ſe réſout en pluie, on apperçoit un ſecond arc dont les extrémités paroiſſent ſe réunir avec celles de l’iris renversé, & préſenter un cercle entier, ou plutôt un anneau complet coloré.

On apperçoit encore des arcs-en-ciel de cette eſpèce ſur la ſurface d’un lac ou d’un étang, lorſque l’eau ſeroit agitée par le vent, de manière à élever des vagues & ſur-tout de petites molécules ou gouttelettes d’eau, dans leſquelles les rayons du ſoleil ſeroient réfractés, réfléchis, & décompoſés, comme ils le ſont dans les gouttes de pluie. On peut en voir de même ſur la ſuperficie des grands fleuves, le ſpectateur étant toujours à une certaine hauteur, de même que le ſoleil à une élévation convenable. Il eſt même poſſible qu’on obſerve encore un arc renverſé, ſi les rayons du ſoleil ſont réfléchis de la ſurface d’un lac tranquille, ſur un brouillard ou ſur des gouttes de pluie tombant à une diſtance convenable.

Arc-en-ciel des cataractes et des cascades.

Les différentes eſpèces d’arcs-en-ciel dont nous avons parlé juſqu’ici, ne ſont guère que momentanées ; mais ceux qu’on obſerve dans les caſcades & dans les cataractes, ſont, en quelque ſorte permanens. On ne doit pas être plus ſurpris de cette permanence, que de voir conſtamment un arc-en-ciel artificiel, toutes les fois qu’on diſpose une ſuite de boules de verre pleines d’eau d’une manière convenable, ſelon la belle expérience de Descartes, & que le ſpectateur étant placé entre