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AIR

toutes les découvertes qu’on a faites juſqu’ici ſur l’air, il reſte encore un vaſte champ pour en faire de nouvelles.

Par les obſervations qu’on a faites ſur ce qui arrive, lorſqu’après avoir été ſaigné dans des rhumatiſmes, on vient à prendre du froid, il eſt avéré que l’air peut s’inſinuer dans le corps avec toutes ſes qualités, & vicier toute la maſſe du ſang & des autres humeurs. Voyez Sang.

Par les paralyſies, les vertiges & autres affections nerveuſes que cauſent les mines, les lieux humides & autres, il eſt évident que l’air, chargé des qualités qu’il a dans ces lieux, peut relâcher & obſtruer tout le ſyſtême nerveux. Voyez Humidité, &c. Et les coliques, les fluxions, les toux & les conſomptions que produit un air humide, aqueux & nitreux, font bien voir qu’un tel air eſt capable de gâter & de dépraver les parties nobles, &c. Voyez l’article Atmosphère.

M. Deſaguliers a imaginé une machine pour changer l’air de la chambre d’une perſonne malade, en en chaſſant l’air impur, & y en introduiſant du frais, par le moyen d’une roue qu’il appelle roue centrifuge, ſans qu’il ſoit beſoin d’ouvrir ni porte, ni fenêtre ; expédient qui ſeroit d’une grande utilité dans les mines, dans les hôpitaux, & autres lieux ſemblables, où l’air ne circule pas. On a déja pratiqué quelque choſe de ſemblable à Londres, pour évacuer de ces lieux l’air échauffé par les lumières & par l’haleine & la ſueur d’un grand nombre de perſonnes ; ce qui eſt très-incommode, ſur-tout dans les grandes chaleurs. Voyez Tranſact. philoſ. n°. 437. page 41.

M. Hales a imaginé depuis peu une machine très-propre à renouveler l’air. Il appelle cette machine le ventilateur. Il en a donné la deſcription dans un ouvrage qui a été traduit en français par M. de Mours, docteur en médecine, & imprimé à Paris il y a peu d’années. Voyez Ventilateur ] & Renouvellement de l’Air.

XII. De l’air relativement à l’économie animale en particulier. Tous les rapports phyſiques qui intéreſſent directement l’économie de notre corps, méritent un examen particulier. L’air eſt d’abord néceſſaire à tous les animaux ; ils ont tous un beſoin de reſpirer. Les quadrupèdes ſont ceux qui peuvent ſupporter moins de temps la privation de cet élément. La plupart périſſent au bout d’une demi-minute, dans une bonne machine pneumatique à double corps de pompe. Ils ſont agités de convulſions, écument, enflent & meurent.

Les oiſeaux éprouvent auſſi des mouvemens convulſifs, ſe vuident aſſez ſouvent par le bec ou par les voies ordinaires, & périſſent bientôt. Ceux qui, volant très-haut, ſont accoutumés à un air fort raréfié, meurent plus tard.

Les poiſſons ne ſont pas exceptés de cette loi ; ils périſſent dans le vide, lorſqu’il eſt continué ; mais indépendamment de cette preuve, nous en avons une autre : nous les voyons ſouvent s’élancer hors de l’eau pour reſpirer l’air. En hiver, lorſque la ſurface des étangs eſt gelée, ils meurent, ſi on n’a ſoin de caſſer la glace en divers endroits.

Les amphibies & les reptiles ont auſſi beſoin de l’air, quoiqu’il ſoit moins preſſant. Les grenouilles vivent depuis 6 juſqu’à 20 heures dans le vide, mais enfin elles ſuccombent. Les ſerpens ont un poumon fort étendu ; le grand volume d’air que l’inſpiration leur a procuré, les diſpenſe de la néceſſité de reſpirer auſſi ſouvent que les autres animaux ; mais, privés abſolument d’air pendant un certain temps, ils meurent. Les vipères réſiſtent 60 heures.

Si on bouche avec de l’huile les ſtigmates des inſectes, ils meurent. Une chenille, par exemple, meurt auſſitôt, l’air ne pouvant alternativement ſortir & rentrer par les ſtigmates. Des chenilles peuvent reſter dans le vide deux ou trois jours mortes en apparence, & reprendre leur vigueur, dès qu’on fait rentrer l’air. Cependant elles meurent bientôt, ſi on les laiſſe plus long-temps ſous le récipient de la machine pneumatique. Les œufs même des chenilles & des vers-à-ſoie ne peuvent éclore dans le vide de cette machine. Les inſectes aquatiques périſſent auſſi dans le vide, quoique beaucoup plus tard que les autres animaux. Si on examine avec attention tout ce qui concerne les inſectes aquatiques, on ſera convaincu de la néceſſité de l’air pour eux, même dans des états de métamorphoſe où il ſembleroit qu’ils peuvent ſe paſſer d’air. Dans l’eau qui a été ſtagnante pendant quelque temps, par exemple, dans celle dont les jardiniers ſe ſervent pour arroſer, on trouve des vers qui un jour ſe transformeront dans cette eſpèce d’inſecte aîlé, ſi connu ſous le nom de couſin. Les organes de la reſpiration ſont, dans ces vers, au-deſſous d’un tuyau placé ſur un des anneaux de leurs corps, & toujours ils en tiennent le bout un peu au-deſſus de la ſurface de l’eau. Si on les inquiète, ils ſe précipitent au fond ; mais bientôt après ils reviennent près de la ſurface de l’eau, comme ils étoient auparavant. Les vers du couſin vivent, à la vérité, pluſieurs jours dans le vide ; ils y nagent avec vivacité, & s’y transforment. Les couſins marchent ſur la ſurface de l’eau, ſans ſe ſervir de leurs aîles ; mais enſuite ils périſſent par un vide trop continué. On connoît une eſpèce de teigne aquatique qui enſuite devient une mouche à quatre aîles ; lorſqu’avant ſa métamorphoſe elle paſſe, comme tous les inſectes, par un état de mort apparente, qu’elle eſt chryſalide ; ces teignes ont encore beſoin de reſpirer l’air qui eſt dans l’eau ; elles ont ſoin de fermer les deux bouts de leurs fourreaux, ſeulement avec de gros fils de ſoie qui ſe croiſent, afin que l’air puiſſe y entrer librement. Ainſi tous les animaux, même ceux qui