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AIR
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Solander ſe ſont ſéparément aperçus que leur corps faiſoit baiſſer conſidérablement le mercure, lorſque la chambre avoit preſque acquis le plus haut degré de chaleur qu’elle pût atteindre. Ces expériences prouvent, de la manière la plus évidente, que le corps a la vertu de détruire la chaleur. » Ce qu’il y a de plus étonnant, c’eſt que les perſonnes ſoumiſes à ces expériences aient conſervé à-peu-près leur température naturelle, et que l’air de la chambre ſi échauffé, ne ſe ſoit pas communiqué au même degré à leurs corps. Mais il faut obſerver que leurs habits les préſervèrent de la chaleur, par le même principe qu’ils garantiſſent du froid, que la chaleur de l’air ſe communique, non avec rapidité, mais avec lenteur ; & que s’ils avoient reſté plus long-temps expoſés à cette chaleur de la chambre chaude, la température de leurs corps ſe ſeroit beaucoup plus élevée ſucceſſivement.

XIII. De la quantité d’eau contenue dans l’air de l’atmoſphère. L’air tient en diſſolution une grande quantité d’eau. Nous avons prouvé, à l’article Atmosphère terrestre, de la nature, de la formation & de la conſtitution de l’atmoſphère, que l’air contenoit une quantité conſidérable d’eau qui s’évapore continuellement en hiver comme en été de la ſurface des étangs, des rivières, des fleuves, des mers, des terres, des végétaux & des animaux. Or, cette quantité d’eau, que l’air tient en diſſolution, eſt très-grande.

Pluſieurs expériences prouvent encore cette vérité. De l’alkali fixe végétal, bien deſſéché, mis dans une balance, devient bientôt plus peſant. Une livre de ce ſel tombe bientôt en déliquium, & pèſe trois livres ; renfermé dans un vaſe bien ſec, plein d’air ſec & enſuite bouché, il ſe fond en partie & acquiert une peſanteur plus grande. Il en eſt de même de pluſieurs autres ſels, quoique l’expérience ne ſoit pas ſi ſenſible qu’avec l’alkali fixe. Or, cette augmentation de poids ne vient que de l’eau contenue dans l’air qui a été abſorbée par ces ſels, & qui a ajouté à ſon propre poids celui de ces ſubſtances ſalines.

Si on met, par exemple, du ſel ammoniac en poudre dans un vaſe plein d’eau, ou ſeulement de la glace, on remarquera bientôt une vapeur aqueuſe qui couvrira la ſurface extérieure du vaſe. Or, cette vapeur, qui augmentera juſqu’à produire des goutes d’eau qui ruiſſeleront, ne vient que de l’eau contenue dans l’air de l’atmoſphère qui environne le vaſe, & qui eſt condenſée par le froid que produit le ſel ammoniac. (Il en eſt de même de quelques autres ſels) ; car il ſeroit abſurde de penſer que cette eau eût traverſé ſa ſubſtance d’un vaſe de verre, de métal, de porcelaine, dans lequel on peut faire l’expérience.

L’expérience ſuivante eſt également concluante. Placez un récipient ſur la platine de la machine pneumatique, ſans employer de cuir mouillé, mais un ſimple cordon de cire pour luter les bords du récipient avec la platine. Lorſqu’on pompera l’air, on obſervera une légère vapeur qui tournoie & qui ſe précipite ſur la platine. Mais cette vapeur n’eſt autre choſe que l’eau contenue dans l’air, & qui ne peut plus y être ſoutenue quand on raréfie l’air. Alors ces molécules aqueuſes diſſéminées, ſe rapprochent les unes des autres, deviennent plus ſenſibles & plus peſantes, & tombent vers le bas du récipient. On fera durer cette expérience autant qu’on le déſirera, en rendant du nouvel air, & en faiſant jouer alternativement la pompe pneumatique. La précaution de ne point employer de cuir mouillé dans cet appareil, eſt afin qu’on ne puiſſe pas objecter que cette vapeur aqueuſe vient de l’humidité du cuir.

Cet appareil, que je viens de décrire, eſt plus ſimple & ſans doute plus rigoureuſement exact que celui de l’abbé Nollet, décrit dans ſes leçons de phyſique. La figure 332 le repréſente ; il conſiſte dans un globe de verre viſſé ſur le goulot d’un récipient, & placé entre l’œil & une bougie allumée pour l’expérience. On fait le vide ſeulement dans le récipient qui eſt ſur la platine de la machine pneumatique, la communication, entre les deux vaiſſeaux, étant fermée. Enſuite on tourne le robinet pour faire communiquer les deux capacités : alors l’air du ballon ſphérique qui eſt au-deſſus, ſe répandant dans le récipient pour ſe mettre en équilibre de denſité, on obſerve, le ballon étant entre la lumière & l’œil du ſpectateur, une vapeur légère qui, après avoir tournoyé, ſe précipite vers le bas de ce vaiſſeau. Cette expérience peut être réitérée à volonté, autant de fois qu’on a fait rentrer du nouvel air dans le ballon.

Toutes les fois qu’on fait jouer la machine pneumatique, on obſerve un phénomène ſemblable : mais comme on auroit pu s’imaginer que la vapeur vient des cuirs mouillés qu’on met ſur la platine de la machine ; M. l’abbé Nollet a employé un grand récipient avec un ballon qui n’ait jamais ſervi à aucune expérience. On trouvera d’autres preuves de ce genre dans un mémoire de M. l’abbé Nollet, inſéré dans ceux de l’académie des ſciences, année 1740, pag. 243.

M. de Sauſſure prétend, dans ſon eſſai ſur l’hygrométrie, que cette expérience ne réuſſit que lorſque dans les tuyaux d’une pompe pneumatique, il y a de l’humidité cachée qui, ſe changeant en vapeur élaſtique, quand l’air ſe raréfie, s’élance avec force dans l’intérieur du récipient. Au moment l’air ſe raréfie, dit-il, la ſurface de cette eau délivrée d’une partie de la preſſion de l’air, ſe réſout en vapeur élaſtique ; cette vapeur ſature d’abord les couches d’air les plus voiſines de la ſurface dont elle ſort, & le ſurplus, que ces couches ne peuvent pas diſſoudre, ſe change en vapeur véſiculaire. Ces véſicules, entraînées par le mouvement que la ſuccion de la pompe imprime à l’air