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ARC
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il pleuve, les rayons venant à ſe réfléchir dans les gouttes de pluie produiront le même effet que ſi le ſoleil étoit ſous l’horiſon, & que les rayons vinſſent de bas en haut ; ainſi la ſurface du cône ſur laquelle les gouttes colorées doivent être placées, ſera tout-à-fait au-deſſus de la ſurface de la terre. Or, dans ce cas ſi ſa partie ſupérieure eſt couverte par des nuages, & qu’il n’y ait que ſa partie inférieure ſur laquelle les gouttes de pluie tombent, l’arc ſera renverſé.

9o. Pourquoi l’arc-en-ciel ne paroît pas toujours exactement rond, & qu’il eſt quelquefois incliné : c’eſt que la rondeur exacte de l’arc-en-ciel dépend de ſon éloignement, qui nous empêche d’en juger : or, ſi la pluie qui le forme eſt près de nous, on appercevra ſes irrégularités ; & ſi le vent chaſſe la pluie, enſorte que ſa partie ſupérieure ſoit plus ſenſiblement éloignée de l’œil que l’inférieure, l’arc paroîtra incliné, en ce cas l’arc-en-ciel pourra paroître oval, comme le paroît un cercle incliné vû d’aſſez loin.

10o. Pourquoi les jambes de l’arc-en-ciel paroiſſent quelquefois inégalement éloignées : ſi la pluie ſe termine du côté du ſpectateur dans un plan tellement incliné à la ligne d’aſpect, que le plan de la pluie forme avec cette ligne un angle aigu du côté du ſpectateur, & un angle obtus de l’autre côté, la ſurface du cône ſur laquelle ſont placées les gouttes qui doivent faire paroître l’arc-en-ciel, ſera tellement diſpoſée, que la partie de cet arc qui ſera du côté gauche paroîtra plus proche de l’œil que celle du côté droit.

11o. C’eſt un phénomène fort rare de voir en même temps trois arcs-en-ciel ; les rayons colorés du troiſième ſont toujours fort foibles à cauſe de leurs triples réflexions : auſſi ne peut-on jamais voir un troiſième arc-en-ciel, à moins que l’air ne ſoit entièrement noir par-devant & fort clair par-derrière.

M. Halley a vu en 1698 à Cheſter trois arcs-en-ciel en même temps, dont deux étoient les mêmes que l’arc-en-ciel intérieur & l’extérieur qui paroiſſoit ordinairement. Le troisième étoit preſque auſſi vif que le ſecond, & ſes couleurs étoient arrangées comme celles du premier arc-en-ciel ; ſes deux jambes repoſoient à terre au même endroit où repoſoient celles du premier arc-en-ciel, & il coupoit en-haut le ſecond arc-en-ciel, diviſant à-peu-près cet arc en trois parties égales. D’abord on ne voyoit pas la partie de cet arc qui étoit à gauche ; mais elle parut enſuite fort éclatante : les points où cet arc coupoit l’arc extérieur parurent enſuite ſe rapprocher, & bientôt la partie ſupérieure du troiſième arc-en-ciel ſe confondit avec l’arc-en-ciel extérieur. Alors, l’arc-en-ciel extérieur perdit ſa couleur en cet endroit, comme cela arrive lorſque les couleurs ſe confondent & tombent les unes ſur les autres ; mais aux endroits où les deux couleurs rouges tombèrent l’une ſur l’autre en ſe coupant, la couleur rouge parut avec plus d’éclat que celle du premier arc-en-ciel. M. Senguerd a vu, en 1685, un phénomène ſemblable, dont il fait mention dans ſa phyſique. M. Halley, faiſant attention à la manière dont le ſoleil luiſoit, & à la poſition du terrain qui recevoit ſes rayons, croit que ce troiſième arc-en-ciel étoit cauſé par la réflexion des rayons du ſoleil qui tomboient ſur la rivière Dée, qui paſſe à Cheſter.

M. Celſius a obſervé, en Dalécarlie, province de Suède, très-coupée de lacs & de rivières, un phénomène à-peu-près ſemblable, le 8 août 1743, vers les 6 à 7 heures du ſoir, le ſoleil étant à 11 degrés 30 minutes de hauteur ; & le premier qui en ait obſervé de pareils, a été M. Étienne, chanoine de Chartres, le 10 août 1665. Voyez le journ. des Sav. & les Tranſact. phil. de 1666, & l’Hiſt. acad. des Sc. an. 1743.

Vitellion dit avoir vu à Padoue quatre arcs-en-ciel en même temps ; ce qui peut fort bien arriver, quoique Vicomercatus ſoutienne le contraire.

M. Langwith a vu en Angleterre un arc-en-ciel ſolaire avec ſes couleurs ordinaires ; & ſous ce premier arc-en-ciel on en voyoit un autre dans lequel il y avoit tant de vert, qu’on ne pouvoit diſtinguer ni le jaune ni le bleu. Dans un autre temps, il parut encore un arc-en-ciel avec ſes couleurs ordinaires, au-deſſus duquel on remarquoit un arc bleu, d’un jaune clair en haut, & d’un vert foncé en bas. On voyoit de temps en temps au-deſſous deux arcs de pourpre rouge, & deux de pourpre vert. Le plus bas de tous ces arcs étoit de couleur de pourpre, mais fort foible, & il paroiſſoit & diſparoiſſoit à diverſes repriſes. M. Musschembroeck explique ces différentes apparences par les obſervations de Newton ſur la lumière. Voyez l’Eſſai de phyſ. de cet auteur, art. 1611. ]

Les mémoires de l’académie de Berlin font mention d’un arc-en-ciel triple qu’on aperçut aux bains de Freyenwalde, vers les ſept heures du ſoir, du côté de l’orient, le 12 juillet 1770. L’arc-en-ciel intérieur étoit accompagné d’un arc extérieur, tous deux tronqués vers le haut par des nuages, enſorte que l’on ne voyoit que la partie boréale, qui deſcendoit juſqu’à l’horiſon ; les couleurs en étoient bien vives ; cependant, l’arc extérieur paroiſſoit d’un tiers plus étroit que l’intérieur, & l’on n’y diſtinguoit exactement que du rouge & du vert.

Entre ces deux iris, mais une fois plus près de l’extérieur, s’élevoit un troiſième arc-en-ciel, qui ſembloit appuyé ſur un nuage à trois ou quatre degrés au-deſſus de l’horiſon. Cet iris n’étoit pas concentrique aux deux autres, il faiſoit partie d’un