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bien, dit Pluche dans le ſpectacle de la nature, tome IV page 335, ne fallut-il pas de délibérations & de préparatifs aux héros de la Grèce, pour traverſer la mer Égée ? Quel bruit ne fit pas, avant le ſiége de Troye, l’expédition des Argonautes, c’est-à-dire, le trajet de la propontide, (aujourd’hui la mer de Marmara, entre le détroit des Dardanelles & celui de Conſtantinople) & du pont Euxin (actuellement la mer noire) : on regarda ce voyage comme un exploit merveilleux, dont la hardieſſe étonna les dieux mêmes : auſſi plaça-t-on dans le ciel ce vaiſſeau qui avoit pu paſſer d’Iolchos à l’embouchure du phaſe. Cependant les barques Turques font aujourd’hui ce voyage.

Mais tandis que les Grecs étoient ſi peu inſtruits dans la ſcience des aſtres, les Phéniciens avoient formé, ſur les côtes de Syrie, un état opulent de cette liſière de la Syrie, très-peu étendu en longueur & preſque ſans largeur. On retrouve des veſtiges de leurs colonies, & des noms propres tirés de leur langue, ſur les trois côtes de la Sicile, dans les principales îles de la Méditerranée, le long des côtes de Barbarie, en Eſpagne, & ſur-tout dans la Bettique, ou Andalouſie. Dans la ſuite, ces hardis navigateurs paſſèrent le détroit de Gibraltar, & allèrent juſqu’à Gadir (Cadix). D’un autre côté, ils établirent leur commerce ſur les côtes d’Afrique & d’Aſie, par le golfe arabique, ou mer rouge. Ce furent les pilotes d’Hiram, roi de Tyr, continue Pluche, qui, environ mille ans avant J. C., & lorſque les Grecs étoient encore novices dans la navigation, l’enſeignèrent avec ſuccès aux Hébreux, & ſervirent de guides aux flottes que Salomon avoit établies dans les ports d’Élaks & d’Eſiongaber, ſur la mer rouge. Les Hébreux & les Tyriens alloient enſemble en Ophir, (aujourd’hui la côte de Sofala) ; ils allèrent enſuite à Tarcis en Eſpagne ; mais ils employèrent trois ans à faire ce voyage ; car on ſait qu’ils firent le tour de l’Afrique, vers l’an 160 avant J. C., par ordre du roi d’Égypte, & doublèrent le cap de Bonne-Espérance, qui fut enſuite oublié pendant 2 000 ans.

Aſtronomie des Grecs. L’aſtronomie chez les Grecs fut peu de chose ; & c’eſt aux étrangers qu’ils durent leurs premières connoiſſances. Thalés de Milet, que pluſieurs auteurs ont dit être phénicien, parut dans un temps où les Grecs n’avoient encore aucune aſtronomie planétaire, environ 600 ans avant J. C. il détermina la courſe du ſoleil d’un ſolſtice à l’autre, qui régla la diviſion de l’année. Thalés fut le premier qui apprit aux Grecs la cauſe des éclipſes ; il connoiſſoit la rondeur de la terre, & diſtinguoit les zones de notre globe par le moyen des tropiques & des cercles polaires ; il parloit du cercle oblique ou zodiaque, du méridien & de la grandeur du diamètre apparent du ſoleil. Hérodote & Pline aſſurent que Thalès avoit prédit aux Ioniens une éclipſe totale du ſoleil, qui arriva pendant la guerre des Lydiens & des Medes, probablement par la période générale de 18 ans & 11 jours, dont il avoit eu ſans doute connoiſſance par les Égyptiens, chez qui il avoit voyagé.

Les Grecs ne connoiſſoient pas encore le mouvement des cinq planètes, lorſqu’Eudoxe en rapporta d’Égypte la première connoiſſance, 380 ans avant J. C. Anaximandre qui fut un des plus grands philoſophes de l’école d’Ionie, que la célébrité de Thalès avoit formée, naquit 610 ans avant J. C. ; Diogène-Laërce nous apprend qu’il établit à Lacédémone un cadran ſolaire & un gnomon, dont l’ombre ſervoit à marquer les équinoxes & les ſolſtices ; il fit le premier la deſcription de la terre & de la mer, & des cartes géographiques, de même qu’une ſphère artificielle. Il meſura avec plus de ſoins qu’on ne l’avoit encore fait, l’obliquité du zodiaque. Il apprit à rapporter les aſtres ſur l’écliptique, au lieu de les rapporter ſur l’équateur ; il enſeigna le mouvement de la terre autour du centre du monde, & de plus, que le ſoleil n’étoit pas moindre que la terre ; il ſoutint l’infinité des mondes ou ſimultanés ou ſucceſſifs. Après Anaximandre, Anaximènes & enſuite Anaxagore, diſciple de ce dernier, ſe diſtinguèrent par leurs connoiſſànces pour l’aſtronomie. Anaxagore qui enſcignoit la philoſophie à Athènes, vers l’an 480 avant J. C., prédit auſſi la grande éclipſe de ſoleil dont parle Thucidide, arrivée la première année de Ia guerre du Peloponèſe, l’an 431 ; mais il ne put le faire que par le moyen de la période de 18 ans 11 jours 7 heures 42 minutes 15 secondes.

Un des Grecs les plus célèbres dans l’aſtronomie, fut Pythagore, qui naquit environ 540 ans avant Jéſus-Chriſt ; on croit qu’il fut le premier qui parla de l’obliquité de l’écliptique & de ſon angle avec l’équateur ; il plaça le ſoleil au centre du ſyſtème planétaire, & fit tourner la terre & les autres planètes autour de lui ; il enſeignoit auſſi que chaque étoile étoit le centre d’un ſyſtème. Démocrite qui ſuccéda à Anaxagore, naquit vers l’an 470 avant Jéſus-Chriſt ; il ſoutint qu’il y avoit des montagnes dans la lune comme ſur la terre ; que la voie lactée étoit un amas immenſe d’étoiles ; qu’il devoit y avoir une infinité de mondes dans un eſpace infini. Philolaüs de Crotone, diſciple de Pythagore & d’Archytas de Tarente, établit le mouvement de la terre d’une manière plus préciſe qu’aucun autre pythagoricien ; il vivoit 450 ans avant J. C. Nicétas de Syracuſe ſoutint ſpécialement la rotation diurne de la terre autour de ſon axe, qu’admit auſſi Ariſtarque de Samos. On compte, ſur-tout parmi les aſtronomes pythagoriciens, Eudoxe de Cnide, ami de Platon, né en 421 avant J. C. & mort l’an 368. Sénèque dit qu’Eudoxe rapporta le premier de l’Égypte la connoiſſance des