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BAC-BAG

quelconque, &c. ; quelques auteurs ont même prétendu qu’il connoiſſoit les lunettes & le teleſcope. Dans ſon opus majus il parle, à la vérité, des avantages qu’on peut retirer de la réfraction de la lumière pour rapprocher les objets, & les augmenter ou diminuer ; & à cette occaſion il démontre que l’interpoſition d’un corps tranſparent convexe, entre l’œil & l’objet, doit faire paroître celui-ci plus grand, & qu’on peut voir les objets dans un miroir concave, quelqu’éloignés qu’ils ſoient. Tout cela annonce, ajoute M. Saverien, la découverte des lunettes, des téleſcopes & des microſcopes ; mais il ne faut pas aller plus loin, & c’eſt aſſurément beaucoup que Bacon ait prévu la poſſibilité de l’invention de ces inſtrumens (Voy. le mot Lunettes ; Dioptrique).

Bacon, en 1167, propoſa au pape Clément IV la correction du calendrier dans lequel il y avoit une grande erreur réſultant de l’anticipation de l’équinoxe ; mais le temps où il vivoit n’étoit pas aſſez heureux pour qu’on voulût corriger de vieilles erreurs. On aſſure qu’il inventa la poudre à canon, ou plutôt qu’occupé à faire quelque mélange, il laiſſa tomber une étincelle ſur un mélange de ſalpêtre, de ſouffre & de charbon contenu dans un mortier, ſur lequel il avoit mis une groſſe pierre. Le feu prit auſſi-tôt à cette compoſition, & la pierre fut lancée au loin par une exploſion qui retentit avec un horrible fracas. On a prétendu que cette découverte fut faite par Barthod Sward, ou Schwartz, religieux du même ordre, d’après les expériences préliminaires de Roger Bacon ; (mais elle appartient au grec Marc). Cette découverte ayant été répandue dans le public, les ingénieurs en firent bientôt uſage dans le ſiége des places, en renfermant ce mélange dans de longs cylindres, formés de lames de fer & d’anneaux de cuivre, & bouchés par des pierres qui par leur choc abattirent les tours des villes. C’est là l’origine des canons. (Voyez artillerie et poudre à canon.)

Dans un intervalle de 20 années, il employa plus de 2 000 livres ſterling, ſomme immenſe pour ce temps là, à former une bibliothèque, à faire des expériences, & à faire conſtruire des inſtrumens.

On prétend que cet excellent génie paya quelque tribut à l’humanité, en recherchant la pierre philoſophale, & adopter les rêves plus ridicules encore de l’aſtrologie judiciaire. Outre les ouvrages déjà cités, il a publié le ſpeculum alchemiæ, & celui de mirabili poteſtate artis & naturæ. Il mourut à Oxford, en 1292. Quoiqu’il ne paſſe pas comme le chancelier Bacon, pour avoir introduit une réformation univerſelle dans les ſciences, on ne peut toutefois lui refuſer le mérite d’en avoir ſenti la néceſſité, & d’avoir même fait naître l’idée du plan que le célèbre chancelier en traça par la ſuite. Roger Bacon joignit à une étendue de génie prodigieuſe le courage néceſſaire pour ſe mettre au-deſſus des préjugés de ſon temps, raſſembler les rayons épars de la vraie ſcience, & tâcher d’agrandir le cercle des vérités par une ſuite de nouvelles découvertes. Une grande partie de ſes ouvrages s’esſ perdue ; ils étoient en ſi grand nombre, que Leland a dit qu’il compteroit plus aiſément les livres des ſybilles, que les titres des ouvrages de Roger Bacon.

BAG

BAGUETTE DÉVINATOIRE. Il eſt peu de préjugés auſſi ridicules & auſſi répandus que celui de la baguette, par le moyen de laquelle on a cru qu’on pouvoit découvrir les ſources d’eau, les mines, les voleurs & les aſſaſſins. Quoique les préjugés populaires ſoient ordinairement fort anciens, cependant celui-ci ne date que du onzième ſiècle, car on n’en trouve aucune mention dans les auteurs qui vivoient avant cette époque. La baguette à laquelle on a donné le nom de divine ou divinatoire, eſt ordinairement un rameau fourchu de Coudrier, d’Aune, de Hêtre, de Pommier, &c. ; quelques-uns ſe ſervent d’une petite branche droite de ces arbres ou arbriſſeaux. Voici la manière dont on a prétendu qu’il falloit ſe ſervir de la baguette fourchue : « on tient d’une main l’extrémité d’une branche, ſans la ſerrer beaucoup, en ſorte que le dedans de la main regarde le ciel. On tient de l’autre main l’extrémité de l’autre branche, la tige commune étant parallèle à l’horiſon, ou un peu plus élevée. L’on avance ainſi doucement vers l’endroit où l’on ſoupçonne qu’il y a de l’eau. Dès que l’on y eſt arrivé, la baguette tourne, & s’incline vers la terre, comme une aiguille qu’on vient d’aimanter ».

On peut être bien ſûr que jamais la baguette n’a tourné qu’entre les mains des charlatans & des fourbes qui ſe ſont fait un jeu d’abuſer de la crédulité du peuple ; car toutes les fois qu’on a voulu ſuivre de près leur marche & leurs opérations, on a reconnu leur impoſture comme nous le dirons bientôt. Rien n’eſt donc plus étonnant que de lire dans l’ancienne encyclopédie, l’explication que M. Formey, ſecrétaire perpétuel de l’académie de Berlin, a donnée de ce fait, par une comparaiſon entre l’aiguille aimantée & la baguette. « La matière magnétique ſortie du ſein de la terre s’élève, ſe réunit dans une extrémité de l’aiguille, où trouvant un accès facile, elle chaſſe l’air ou la matière du milieu ; la matière chaſſée revient ſur l’extrémité de l’aiguille, & la fait pancher, lui donnant la direction de la matière magnétique. De même à-peu-près, les particules aqueuſes, les vapeurs qui s’exhalent de la terre & qui s’élèvent, trouvant un accès facile dans la tige de la branche fourchue, s’y réuniſſent, l’appéſantiſſent, chaſſent l’air ou la matière du milieu. La matière chaſſée revient ſur la tige appeſantie, lui donne la direction des vapeurs, & la fait pencher vers la terre, pour vous avertir qu’il y a ſous vos pieds une ſource d’eau vive. Cet effet, continue M. Formey, vient peut-