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BAG

y aient plus de fraîcheur & de vigueur que dans d’autres, on peut conclure, ſans crainte de ſe tromper, qu’en y creuſant la terre, il y aura de l’eau.

4o. Si on place en pluſieurs endroits de très-longues aiguilles de bois, en équilibre, comme des aiguilles de bouſſole, & qu’à leurs extrémités on ait ſuſpendu des éponges, on verra l’équilibre ſe perdre, & l’aiguille s’incliner du côté où il y a de l’eau ſouterraine.

5o. On peut être aſſuré qu’il y a de l’eau dans tous les endroits bas où ſe terminent les pentes des montagnes.

6o. Si un terrein argilleux ſe trouve à une certaine profondeur au-deſſous d’une terre ſabloneuſe, on trouvera inconteſtablement de l’eau, en creuſant la terre.

7o. Si dans certains endroits d’une campagne couverte de neige, on voit des vapeurs s’élever ; ou ſi au printemps la neige fond plutôt en certains endroits que dans d’autres.

8o. Il n’y a ni roſée, ni givre dans les endroits qui ſont ſur des ſources.

Ces moyens ne ſont point inconnus aux impoſteurs qui ſe ſervent de la baguette divinatoire. Ils ont ſoin de parcourir l’étendue d’un terrein, d’examiner de quel côté ſe trouvent les montagnes & les collines les plus proches, quelle eſt la direction des pentes, quelle eſt la nature du terrein, de quel côté ſe trouvent les ſignes naturels qu’on vient de rapporter ; enſuite s’armant de la baguette, ils la font tourner vers les endroits, & plus fortement ſur les lieux où ils ont jugé qu’il y avoit de l’eau. Il n’eſt donc pas étonnant que lorſqu’on fait creuſer on ne rencontre de l’eau, ſur-tout ſi on fait attention qu’il y a de l’eau par-tout, au moins à une certaine profondeur

J’ai vu beaucoup de ces gens qu’on diſoit être doués de cette vertu, & qui s’étoient fait une grande réputation, dans les campagnes & même dans pluſieurs villes ; & il n’en eſt aucun en qui je n’aie remarqué de la fineſſe, de l’aſtuce & de l’impoſture. J’ai vu ſurtout le fameux ſourcier Bletton, je l’ai ſuivi & examiné de près, & j’ai été convaincu qu’il avoit ſeulement de la hardieſſe, quelques connoiſſances de pratique, un coup d’œil exercé, & un extérieur propre à en impoſer à ceux qui ſont nés pour être dupes.

J’ajouterai qu’indépendamment des moyens naturels dont on a parlé ci-deſſus, ordinairement on lui fourniſſoit, ſans le vouloir, des moyens de deviner ce qu’on déſiroit ſavoir de lui. Un grand nombre de personnes ſe raſſembloit pour être témoin de ſes opérations, & il s’en trouvoit toujours pluſieurs d’aſſez indiſcrètes pour lui indiquer indirectement divers circonſtances qu’on vouloit lui cacher pour les faire deviner. L’un diſoit : conduiſons-le à la maiſon de campagne de M…, pour ſavoir s’il découvrira où eſt la ſource, le puits, l’eau qui l’alimente, &c. &c ; arrivé à l’endroit, un autre diſoit : il faut le mettre à peu-près ſur la voie : l’eau ne vient pas de tel & tel côtés ; mais elle peut venir de celui-ci ou de celui-là, examinons s’il nous dira ce qu’il en eſt, &c. &c. De ſorte que dans un grand nombre d’occaſions, où on croyoit qu’il avoit deviné, il n’étoit démontré qu’on lui avoit fait connoître d’avance tout ce qui avoit rapport à ce qu’on déſiroit ſavoir de lui : je pourrois rapporter en détail ce que j’ai vu dans bien des occaſions où des personnes crédules s’imaginoient qu’il avoit deviné ce qu’on lui avoit réellement dit, tandis que des obſervateurs judicieux étoient perſuadés qu’il n’y avoit que de l’impoſture & de la fineſſe. Ces moyens joints aux indices naturels, & ſur-tout à la perſuaſion qu’il y a, comme cela eſt certain, de l’eau par-tout, font toute la ſcience des ſourciers.

Rien n’étant plus utile que de détruire les préjugés populaires, je penſe qu’il eſt à propos d’inſiſter un peu ſur ce dernier article. Il eſt ſi ſûr qu’en creuſant on trouve de l’eau preſque par-tout, qu’on peut parier avec un très-grand avantage, principalement dans les plaines & les bas fonds, qu’on pourra faire des puits dans les endroits où cela ſeroit commode. J’ai connu un propriétaire de pluſieurs domaines qui m’a aſſuré n’avoir jamais ſuivi d’autre règle pour fixer l’emplacement des puits qu’il faiſoit conſtruire, que celle de la commodité, & avoir toujours rencontré de l’eau. Un prélat diſtingué par ſes connoiſſances donna, il y a quelque temps, une grande preuve de cette vérité. Déſirant de faire conſtruire dans une de ſes terres un puits qui lui étoit très-néceſſaire, il fait creuſer à une profondeur ordinaire, mais ne trouve point de l’eau. Bien convaincu des principes que nous avons établis, il ordonne qu’on continue l’opération : tous les ouvriers & l’architecte déſeſpéroient de trouver de l’eau ; on enjoint néanmoins de creuſer encore plus profondément, & enſuite on trouva de l’eau. Je ſais que dans les circonſtances ordinaires les vues économiques empêchent de faire des excavations à de grandes profondeurs, & ce n’eſt pas dans ce deſſein que je viens de citer ce fait ; je ne l’ai rapporté que pour confirmer le principe ci-deffus mentionné, que preſque par-tout il y a de l’eau dans les endroits ſitués dans les plaines, & conſéquemment que par-tout on peut connoître par des ſignes naturels l’exiſtence de cette eau, qui eſt conſtante dans les mêmes endroits.

Pour mieux faire entendre combien il eſt facile d’en impoſer à la crédulité du vulgaire, je vais citer l’exemple ſuivant, qui eſt un fait réel, & qu’on pourroit préſenter avec une apparence de merveilleux, ſi on vouloit faire illuſion. Des