Page:Encyclopédie méthodique - Physique, T1.djvu/448

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
10.*
BAI

bâtir des étuves & des bains avec le marbre le plus précieux, & dans les règles de la plus belle architecture, où ils prenoient plaiſir à ſe baigner avec le peuple. On prétend qu’il y avoit juſqu’à huit cent de ces édifices répandus dans tous les quartiers de Rome. D’autres diſent qu’il y en eut mille vingt-quatre, tant publics que particuliers. On voit encore en France des bains romains plus ou moins bien conſervés ; par exemple, à Lyon, à Nîmes, &c. ; outre les bains publics, il y en avoit encore de particuliers. Parmi nous les bains publics ne ſont autre choſe que de grands bateaux, ſur leſquels on a conſtruit en bois de petits édifices, & dans leſquels on peut prendre le bain dans l’eau même des fleuves ou rivières.

Il y a autant d’eſpèces de bains qu’il y a de fluides différens dans leſquels on peut ſe plonger ; cependant le mot de bain, en général, eſt réſervé à celui qu’on prend dans l’eau. On peut prendre des bains dans le lait, &c., &c. On en peut prendre même dans le ſable, dans la terre ; les gens de l’art les preſcrivent quelquefois avec ſuccès. Un illuſtre phyſicien, Franklin, a conſeillé de prendre des bains d’air ; il ne faut pour cet effet que ſe dépouiller de ſes vêtemens ; ils rafraîchiſſent beaucoup, & facilitent l’évaporation de la matière perſpiratoire.

On peut donner aux divers fluides qui ſont la matière des bains différens degrés de chaleur ou de froid ; l’eau peut être plus ou moins chaude, & plus ou moins froide. M. Pomme, célèbre praticien, a employé avec beaucoup de ſuccès les bains froids & même les bains à la glace, ſur-tout dans les maladies nerveuſes. Les bains de quelque eſpèce qu’ils ſoient, peuvent être pris en y plongeant tout le corps, ou ſimplement quelques parties : ce qui forme la diviſion des bains en entiers & en partiels ; on les diviſe encore en naturels & artificiels ; ceux-ci ſont compoſés de ſubſtances médicamenteuſes ; & ceux-là de fluides naturels, principalement d’eau, tels que l’eau de mer, l’eau de rivière, les eaux thermales, naturellement chaudes, les eaux minérales qu’on trouve en divers endroits de la ſurface de la terre, principalement dans les pays de montagnes.

Lorsqu’on prend des bains on doit choiſir préférablement à toute autre, de l’eau courante, telle que celle des ruiſſeaux dont l’eau eſt limpide, & qui coule ſur un fond ſabloneux ou couvert de petits cailloux, celle des rivières & des fleuves dont le cours eſt rapide. On doit éviter avec ſoin celle des étangs, des mares, des canaux dans leſquelles des plantes & des animaux ſe putréfient ; ces bains bien loin d’être ſalubres ſeroient des cauſes de maladies très-graves.

Les principaux avantages des bains ordinaires ſont de laver le corps & d’enlever de deſſus ſa ſurface le ſédiment de la matière de la tranſpiration qui obſtrue les pores & nuit conſéquemment à la liberté de la tranſpiration ; d’aſſouplir la peau en l’humectant, de fournir aux pores abſorbans des molécules aqueuſes, &c. Franklin rapporte qu’on a trouvé plus peſant, après le bain qu’auparavant, un homme qu’on avoit fait reſter à deſſein plus long-temps dans l’eau ; le bain rafraîchit encore, parce que l’eau ayant environ neuf cent fois plus de peſanteur ſpécifique que l’air, & conſéquemment plus de denſité, le contact de l’eau ſur la ſuperficie du corps humain ſe faiſant en plus de points, il faut que le corps communique plus de degré de chaleur à l’eau qui l’environne qu’à l’air qui l’entoure, ce qui forme le rafraîchiſſement, objet auſſi ſalubre qu’agréable. Les bains fortifient le tempérament, & c’eſt une pratique ſalutaire que de baigner ſouvent les enfans dès l’âge le plus tendre. Un philoſophe a dit avec beaucoup de raiſon : mères, plonger vos enfans dans l’eau, c’eſt les plonger dans le ſtyx ; c’eſt les rendre invulnérables comme Achille.

Un des meilleurs ouvrages qui aient été fait ſur l’objet de cet article, eſt le Traité théorique & pratique des bains d’eau ſimple & d’eau de mer, par M. Marteau, qui remporta le prix propoſé par l’Académie de Bordeaux ſur cette queſtion : Déterminer l’action & l’utilité des bains, ſoit d’eau douce, ſoit d’eau de mer. Nous croyons à propos d’en donner une idée, ſur-tout de la partie qui a rapport à la Phyſique.

L’eau du bain peut agir par ſes propriétés abſolues, la peſanteur & la fluidité, & par ſes qualités accidentelles & relatives, ſa ſalure & ſa température, c’eſt-à-dire, par ſes différens degrés de chaleur ou de froid. Ces différentes propriétés & qualités de l’eau agiſſent par leur ſomme, quand elles conſpirent au même effet. C’eſt ainſi que la peſanteur & le froid du bain concourent à reſſerrer les fibres, & ce reſſerrement eſt le produit de la ſomme de ces deux cauſes. Quelquefois au contraire elles tendent à un but oppoſé. C’eſt ainſi que tandis que la preſſion de l’eau tend à reſſerrer & à condenſer les fibres, la chaleur humide du bain les relâche & les amollit. Il en eſt de même encore de la preſſion qui tend à inſinuer l’eau dans les pores abſorbans, tandis que la température froide, en ſaiſiſſant & reſſerrant ſes tuyaux, s’oppoſe à cette pénétration. Dans tous ces cas l’action du bain eſt le produit de l’excès d’énergie d’une ou pluſieurs de ces cauſes ſur les cauſes oppoſées.

Lorſque le corps humain eſt dans le bain, il