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chaque année, les regiſtres de l’académie de Lyon, il en eſt une ſur-tout bien remarquable, celles de deux paſſages de Mercure ſur le Soleil, & principalement de celui qui arriva le 6 mai 1753 ; c’étoit le quatrième paſſage de cette planette obſervé dans le nœud deſcendant. Il s’agiſſoit de décider entre les tables de Caſſini & celles de Halley, corrigées par Deliſle. Les calculs faits d’après les unes & les autres, donnoient pour l’entrée de Mercure ſur le Soleil une différence de quatre heures ſept minutes ; l’obſervation jugea en faveur des dernières, Mercure quitta le Soleil à dix heures 31 minutes 41 ſecondes : ſuivant les tables de Halley, l’émerſion totale devoit avoir lieu à 10 heures 47 minutes pour le méridien de Lyon ; la différence ne fut pas de 16 minutes. Une autre circonſtance intéreſſante de ce paſſage fut l’anneau lumineux apperçu autour de Mercure pendant tout le temps qu’il fut ſur le ſoleil. Il avoit été vu en 1736 à Montpellier, par M. de Plantade ; le père Beraud, ainſi que tous les aſtronomes, l’avoient cherché inutilement en 1743 ; à l’époque dont nous parlons il eut la ſatisfaction de le voir & de le montrer. Pendant tout le temps de l’obſervation, qui dura cinq heures, Mercure parut environné d’un anneau parfaitement circulaire, d’un rouge obſcur à-peu-près ſemblable à la lumière qu’on apperçoit ſur la lune dans ſes éclipſes totales, lorſqu’elle eſt entièrement dans l’ombre de la terre. À quoi attribuer ce phénomène, ſinon à l’atmoſphère de Mercure qui abſorbe ou intercepte une partie des rayons ſolaires ? Les obſervations du père Beraud n’étoient pas ſtériles entre ſes mains ; il ſavoit en tirer des conſéquences qui, en même-temps qu’elles prouvoient l’exactitude de l’obſervateur, ſervoient à confirmer, ou d’anciens réſultats ou des calculs modernes. C’eſt ainſi qu’ayant fixé alors l’inclinaiſon de Mercure, ſon diamètre, ſon nœud deſcendant, il ſe trouva ſi parfaitement d’accord, & avec M. de la Lande qui avoit fait à Paris la même obſervation, & avec le grand Caſſini qui avoit ſuivi autrefois de ſemblables paſſages, qu’on peut regarder ſes réſultats comme la théorie du mouvement de Mercure.

Le père Beraud s’acquitta avec ſuccès de la fonction de directeur de l’obſervatoire de Lyon, pendant vingt-deux ans. Durant cet intervalle de temps, il n’y a pas eu une ſeule éclipſe de ſoleil ou de lune, une apparition de comète dont il ait négligé de rendre compte à l’académie de Lyon ; les aurores boréales, les taches du ſoleil lui fournirent matière à pluſieurs mémoires. Il donnoit l’inſtant des équinoxes, & ce fut pour le calculer avec la dernière préciſion, qu’il entreprit la méridienne du collége, à laquelle il apporta l’attention la plus ſcrupuleuſe. On peut dire qu’il a fait à ſes ſucceſſeurs un magnifique préſent, en leur fourniſſant un inſtrument en grand, beaucoup plus ſûr qu’un quart de cercle, pour déterminer l’obliquité & ſes variations, mesurer le cours du ſoleil & ſon mouvement en déclinaiſon, fixer le temps des équinoxes & des ſolſtices ; l’entrée du ſoleil dans chaque ſigne, enfin connoître les réfractions qui élèvent les aſtres au-deſſus de leur poſition véritable.

L’académie des ſciences de Paris s’empreſſa de s’attacher, dès 1751, ce laborieux obſervateur, en qualité de correſpondant, avec l’illuſtre abbé de la Caille. Ce ſavant diſtingué avoit pour le père Beraud une eſtime ſingulière, & beaucoup de confiance en ſon exactitude : lorſqu’il alla au Cap-de-bonne-Eſpérance pour y former ce fameux catalogue de dix mille étoiles auſtrales dont il a enrichi l’aſtronomie, il invita ſpécialement l’aſtronome de Lyon à y faire les obſervations correspondantes à celles qu’il devoit faire lui-même à 2 000 lieues de là, pour en conclure les parallaxes de Mars & de Vénus, & conſéquemment leurs diſtances à la terre. Ils choiſirent des temps peu éloignés de l’oppoſition, comme les plus favorables ; & M. de la Caille ayant communiqué ſes obſervations, le père Beraud calcula, & donna pour la plus grande parallaxe de Mars, 27 ſecondes 46 tierces, & pour la moindre diſtance de la terre, 7 429 diamètres terreſtres.

Cet obſervateur zélé conſacra encore une partie de ſon temps aux obſervations météorologiques, une des parties les plus utiles de la phyſique ; il les a continuées pendant vingt années ; & le dépôt s’en trouve dans les regiſtres de l’académie de Lyon. Elles lui donnèrent occaſion de faire des remarques importantes en différens genres ; par exemple, le père Beraud s’apperçut, à l’occaſion des thermomètres, que la différence dans le calibre des tubes en apportoit dans les effets de la dilatation, en ſorte qu’ayant placé à la même température deux tubes inégaux en diamètre, le mercure lui parut plus élevé d’un degré dans le plus petit. Il en chercha la raiſon, & partant de ce principe, qu’un tube capillaire a plus de ſurface qu’un gros tube, à raiſon des maſſes de mercure qui y ſont contenues, & que la dilatation eſt en raiſon directe des superficies, il jugea qu’en effet le mercure devoit être d’autant plus élevé dans le tube, que ſon diamètre étoit plus reſſerré. Il propoſa pour remédier à cet inconvénient, de conſtruire les thermomètres de manière que les ſurfaces ſoient en raiſon des maſſes, & il donna aux ouvriers des moyens pour y réuſſir : cet objet fut le ſujet de trois mémoires.

En 1747, il s’exerça ſur une queſtion qui avoit été long-temps une énigme pour les phyſiciens. La plupart des matières métalliques pouſſées au-delà de la fuſion, & juſqu’à la calcination, ſe trouvent réduites ſous une forme terreuſe ; & cette eſpèce de pouſſière qu’on appelle chaux, a plus de poids