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fut uniforme & réglée, exempte de paſſions & même de chagrins. Malgré la délicateſſe de ſon temperament, il conſerva juſqu’à près de quatre-vingts ans ſa tête toute entière ; ſes derniers ouvrages ſont dignes de lui. Il mourut le 17 mars 1782.

BERYL ; C’eſt le nom que donnent quelques-uns à l’aigue-marine, c’eſt-à-dire, à cette eſpèce de pierre précieuſe qu’on appelle plus communément aigue-marine, & qui eſt de couleur de verd de mer. Nous en avons déjà parlé à l’article Aigue-marine, auquel nous renvoyons.

BET

BÊTES, ame des bêtes. Il y a peu de queſtions qui aient été autant & ſi long-temps agitées que celle de l’ame des bêtes : la ſolution n’en eſt pas cependant plus avancée après des volumes ſans nombre de diſputes & de diſcuſſions. L’état de la question ſe réduit à ſavoir ſi les bêtes ont une ame ou ſi elles n’en ont pas. Dans l’hypothèſe où elles en ont une, cette ame eſt-elle ſpirituelle ou matérielle, ou bien tient-elle un milieu entre l’eſprit & la matière ?

Si les bêtes n’ont pas d’ame, elles ſont des machines, & toutes leurs opérations ſont un pur effet de l’automatiſme. Dans ce ſentiment, les bêtes ſont des automates que Dieu a faits ; l’Être ſuprême a créé, arrangé & monté les reſſorts ſecrets dont le développement produit toutes les actions que nous remarquons en elles. Vaucanſon a fait le fluteur & le canard, automate que tous ceux qui l’ont vu ont admiré. Oſeroit-on refuſer au créateur le pouvoir & l’intelligence propre à produire des machines de cette eſpèce & beaucoup plus parfaites. (Voyez le mot Automates.) C’étoit le ſentiment de Deſcartes, de Mallebranche, de Paſcal, d’Arnaud, & de tous les cartéſiens célèbres. Les objets extérieurs & les émanations qui s’en échappent déterminent, ſelon les circonſtances, l’action des mouvemens automatiques des bêtes. S’il falloit prendre un ſentiment, j’avoue que je pencherois beaucoup pour l’automatiſme des bêtes réuni à l’harmonie préétablie de Léibnitz. Sous le rapport d’automatiſme, la queſtion de l’ame des bêtes tient à la Phyſique ; & n’eſt point étrangère à ce Dictionnaire ; ſous celui d’ame ſpirituelle, elle appartient à la Métaphyſique : c’eſt pourquoi nous ne nous étendrons pas ſur ce dernier objet. Pour compléter l’aperçu général que nous nous propoſons ſeulement de faire ici, nous ajouterons encore quelques mots.

En ſuppoſant une ame dans les bêtes, elle ne peut être matérielle, à moins que cette hypothèſe ne rentre dans celle de l’automatiſme ; mais alors c’eſt improprement qu’on diroit qu’elles ont une ame ; car par ce terme on entend un principe différent de la matière ; & ſi ce principe étoit ſuppoſé matériel, il ne pourroit, pas plus que le corps auquel il ſeroit uni, être le moteur des actions des animaux.

On ne peut pas admettre dans les bêtes une ame qui tienne le milieu entre l’eſprit & la matière ; car une ſubſtance de ce genre, mitoyenne entre la ſimplicité & la compoſition, entre l’activité & l’inertie, implique contradiction. Cette hypothèſe, outre les objections qui lui ſont propres, eſt expoſée à celles qui attaquent les deux ſentimens extrêmes dont elle eſt le terme moyen.

Si cette ame eſt ſpirituelle, elle eſt d’un ordre au moins égal en intelligence à celle de l’homme, ou d’un ordre inférieur. On ne peut ſoutenir la première opinion qu’en diſant avec le père Bougeant que le corps des bêtes eſt animé par des diables, ainſi qu’on l’a vu à l’article Bougeant.

Ceux qui croient que l’ame des bêtes eſt d’un rang au-deſſous de celle de l’homme, bornent ſon intelligence ; & les limites qu’on lui preſcrit, ſont plus ou moins reſſerrées ſelon les divers ſyſtêmes qu’on ſe forme. Le plus grand nombre réduit les animaux aux ſeules ſenſations ; quelques-uns leur donnent des idées directes, mais aucune idée réfléchie, aucun raiſonnement. En partant de l’eſſence d’une ſubſtance ſpirituelle en général, il eſt difficile d’avoir une idée claire & intelligible de ces bornes qu’on établit ſi gratuitement ; ſi elles ſentent, elles ont la conſcience de leur ſentiment ; ſi elles penſent d’une manière quelconque, elles doivent combiner leurs idées & conſéquemment réfléchir, &c., &c. D’ailleurs les actions des bêtes, leurs déterminations ſelon les circonſtances, leurs ouvrages pleins d’induſtrie, les ſervices qu’ils nous rendent avec tant d’intelligence ; le chien ſur-tout, ce fidèle compagnon de l’homme ; les manèges du chat, du ſinge ; l’adreſſe des caſtors, celle des araignées, du fourmi-lion, &c., &c., &c., prouvent bien que leur ame, s’ils en ont une, n’eſt pas circonſcrite dans des bornes auſſi étroites qu’on ſeroit tenté de le croire. L’Hiſtoire naturelle nous fourniroit, ſi tel étoit notre but, une multitude de preuves étonnantes. En vain s’efforceroit-on d’y répondre en ayant recours à l’inſtinct ; car l’inſtinct n’eſt qu’un mot vide de ſens, indigne d’être prononcé par aucun philoſophe.

Nous admettons, pour un inſtant, que les bêtes aient une ame ; quel eſt leur ſort après la mort ? Elle eſt annihilée ; non, il eſt bien plus probable qu’il y a parmi les animaux une métempſicoſe. Y a-t-il un grand inconvénient à voir paſſer les ames des bêtes d’un corps dans un autre ? Eſt-il plus ſimple d’annihiler des légions d’ames des bêtes pour en recréer à chaque inſtant des myriades ?… Mais abandonnons ici la métaphyſique ; c’eſt un champ vaſte & même immenſe qui fournit des armes ſans fin à ceux qui veulent s’en servir ; après y avoir