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AIM
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Pareillement, ſi l’on fait nager ſur du mercure un aimant ſphérique, après en avoir bien reconnu l’axe & les pôles, il ſe dirigera d’abord à-peu-près nord & ſud ; mais on remarquera auſſi que ſon axe s’inclinera d’une manière conſtante ; en ſorte que dans nos climats le pôle auſtral s’incline, & le pôle boréal s’élève ; & au contraire dans l’autre hémiſphère. Cette inclinaiſon varie auſſi dans tous les lieux de la terre, & dans tous les temps de l’année, comme on peut le voir à l’article Aiguille aimantée, où l’on en parle plus amplement.

Les pôles de l’aimant ſont, comme nous l’avons dit précédemment, des points variables que nous ſommes quelquefois les maîtres de produire à volonté, & ſans le ſecours d’aucun aimant, comme nous verrons qu’il eſt facile de le faire par les moyens que nous expoſerons dans la ſuite ; car lorſqu’on coupe doucement & ſans effort un aimant par le milieu de ſon axe, chacune de ſes parties a conſtamment deux pôles, & devient un aimant complet : les parties qui étoient contiguës ſous l’équateur avant la ſection, & qui n’étoient rien moins que des pôles, le ſont devenues, & même pôles de différens noms ; en ſorte que chacune de ces parties pouvoit devenir également pôle boréal ou pôle auſtral, ſuivant que la ſection ſe ſeroit faite plus près du pôle auſtral ou du pôle boréal du grand aimant : & la même choſe arriveroit à chacune de ces moitiés, ſi on les coupoit par le milieu de la même manière. Voyez fig. 334.

Mais, ſi au lieu de couper l’aimant par le milieu de ſon axe AB, on le coupe ſuivant ſa longueur fig. 335, on aura pareillement les pôles aa, bb, dont ceux du même nom ſeront dans chaque partie, du même côté qu’ils étoient avant la ſection, à la réſerve qu’il ſe ſera formé, dans chaque partie un nouvel axe ab, ab, parallèle au premier, & plus ou moins rentré au-dedans de la pierre, ſuivant qu’elle aura naturellement plus de force magnétique. Voyez Pôle magnétique & Centre magnétique ].

L’aimant a ſept propriétés, ſavoir : celle de l’attraction, de la répulſion, de la direction, de la déclinaiſon, de la variation, de l’inclinaiſon, et de la communication.

Première propriété. Attraction. L’attraction magnétique eſt une des propriétés de l’aimant qui s’eſt offerte la première dans les temps les plus reculés. On a prétendu qu’un berger, qui avoit des clous à ſes ſouliers, marchant ſur une roche d’aimant, avoit éprouvé une réſiſtance à ſe mouvoir, par un effet de l’attraction magnétique. D’autres ont cru qu’ayant enfoncé dans la terre ſa houlette, armée d’une pointe de fer par le bout, il ſentit, en la retirant, une adhérence marquée, & que cette effet lui fit bientôt découvrir la cauſe de cette réſiſtance, en fouillant la terre, puiſqu’alors il trouva un aimant. Les vrais phyſiciens auront de la peine à croire la réalité de ces anecdotes, parce que l’aimant non armé n’a pas aſſez de force pour produire une attraction & une adhérence capables d’indiquer de cette manière ſon exiſtence dans la terre.

Thalès de Milet, 600 ans avant l’ère chrétienne, a parlé de l’attraction de l’aimant. Platon a connu ce phénomène, puiſqu’il fait mention de l’expérience d’une pierre qui tient ſuſpendus pluſieurs anneaux de fer, comme s’ils formoient une chaîne : ut longiſſima annulorum ferreorum ſeries continuo quodam nexu aptetur. Dialog. Jon.

Galien dit que cette vertu attractive a quelque choſe de divin ; Aphrodiſe aſſure qu’elle n’eſt bien connue que de Dieu ſeul. Saint Auguſtin rapporte dans la cité de Dieu. Liv. 21, chap. 4, que la première fois qu’on lui fit voir une pierre d’aimant qui enlevoit le fer avec une grande rapidité, il en fut tout épouvanté : magnetem lapidem novimus mirabilem ferri raptorem ; quod cùm primum vidi, vehementer inhorrui. Si nous n’avions jamais vu ni ouï parler des phénomènes de l’aimant, nous ſerions pénétrés du même étonnement, lorſque nous ſerions témoins pour la première fois des propriétés preſque magiques de l’aimant.

L’attraction qui règne entre l’aimant, & le fer ou l’acier, eſt démontrée par pluſieurs expériences que tout le monde peut répéter facilement.

Première expérience. Suſpendez en équilibre un morceau de fer à un bras de balance, & préſentez, au-deſſous de ce fer, à une diſtance convenable, un aimant, ſoit naturel, ſoit artificiel ; le morceau de fer ſera auſſitôt attiré, & l’équilibre rompu. Le fer ſuſpendu par un cordon s’élèvera ou s’abaiſſera ſelon que l’aimant ſera préſenté au-deſſus ou au-deſſous du fer. Voyez la figure 336.

Seconde expérience. Placez une aiguille d’acier non aimantée ſur ſon pivôt, comme on le voit dans la figure 337 ; approchez un aimant, ou barreau d’acier aimanté, vous verrez auſſi-tôt l’extrémité de l’aiguille, qui eſt la plus proche, ſe mouvoir vers l’aimant ; & après pluſieurs oſcillations, ſe fixer de ce côté.

Troiſième expérience. Faites ſurnager, par le moyen d’un liége, un fil de fer a, b, et préſentez l’aimant B, A, vous verrez bientôt le fer attiré, s’approcher de l’aimant. On fait quelquefois cette expérience en ſubſtituant au fil de fer placé ſur le liége, un petit cygne d’émail, qui, étant creux, ſurnage de lui-même ; il tient à ſon bec un fil de fer. Il obéit également à la force attractive, (figure 338).

Quatrième expérience. Préſentez un aimant à de la limaille de fer, à des cloux, à de petites clefs : auſſitôt, ces différens corps ſeront attirés par l’aimant qui les tiendra ſuſpendus en l’air, malgré leur gravité. L’attraction magnétique aura même tant de force, qu’en ſoufflant, ſur un côté de l’an-