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AIM

déclinaiſon, on ne peut conclure de ſes obſervations la vraie déclinaiſon annuelle de l’aimant.

Le P. Cotte a négligé, depuis environ 1770, de publier les déclinaiſons annuelles, parce que, s’étant appliqué à conſtater les variations diurnes & périodiques de l’aiguille aimantée, il a perdu confiance, m’écrivoit-il en dernier lieu, dans les réſultats d’une obſervation annuelle qui, ſelon lui, ne ſignifie rien, puiſque l’aiguille a des variations qui dépendent non-ſeulement des ſaiſons, mais même de l’heure du jour à laquelle on obſerve.

Nous allons rapporter quelques obſervations qui confirmeront les vérités qui viennent d’être expoſées. Commençons par quelques-unes des dernières années : M. Caſſini a trouvé à l’Obſervatoire, que le 1er. janvier 1785, l’aiguille ſuſpendue par un fil de ſoie, déclinoit de 21 degrés 33 minutes, & le 30 mai ſuivant, que ſa déclinaiſon étoit de 22 degrés 0 minutes : dans l’eſpace de cinq mois, la même aiguille, ſuſpendue de la même manière, dans le même lieu, obſervée par le même ſavant ; en un mot, toutes choſes égales, a décliné de 27 minutes, ce qui eſt conſidérable. Connoiſſ. des temps, de 1789 ; & Extrait des obſervations faites à l’Obſervatoire, ou Mémoires de l’académie des ſciences.

En 1784, les 20, 23 & 26 février, l’aiguille aimantée, obſervée à une heure & demie, à Paris, mais à deux minutes & demie au nord de l’Obſervatoire, donna les déclinaiſons ſuivantes : 21 degrés 2 minutes & demie ; 20 degrés 57 minutes & demie ; 21 & 13 minutes, à M. le Monnier, l’aſtronome.

En 1783, le même ſavant obſerva au même lieu, & toujours avec le même inſtrument, les déclinaiſons ſuivantes :

1783
21° 0m & 5m le 21 Mars, à 3 h. ½ du ſoir.
20° 53m le 12 Mai, à 4 h. ½ du ſoir.
21° 55m le 02 Juin, à 5 h. ½ du ſoir.
20° 55m le 18 Décem. 3 h. ½ du ſoir.

On pourroit prouver, par pluſieurs autres exemples de ce genre, qu’il y a ſouvent de grandes différences dans les obſervations faites par la même perſonne, la même année, dans le même lieu, avec le même inſtrument, mais ce petit nombre d’obſervations qu’on vient de rapporter, ſuffit. Or, ceux qui forment des tables, peuvent prendre, & ont pris ſouvent une obſervation plutôt qu’une autre, ſans aucune raiſon déterminante : ce qui fait voir que les réſultats des tables ne ſont point concluans.

Ajoutons que ſouvent dans ces ſortes de tables, il y a, pendant quelques années, des obſervations moyennes, tandis que dans d’autres, on en a mis qui n’étoient que des obſervations d’un jour ou plutôt d’une heure. Ainſi, dans la table précédente, depuis 1773 juſqu’à 1778 excluſivement, on trouve des déclinaiſons moyennes, obſervées par le P. Cotte, à Montmorency, tandis que, dans pluſieurs des années ſuivantes, comme en 1778, 1779, 1780, 1783, 1784, les obſervations ſont ſimples, & de M. le Monnier, avec ſon aiguille à ſecteur : pendant les années qui ſuivent, les déclinaiſons ont été obſervées par M. Caſſini, à l’obſervatoire, avec ſon aiguille à ſuſpenſion de fil de ſoie, & toujours le premier juin.

C’eſt en multipliant les obſervations avec les mêmes inſtrumens, ou avec des inſtrumens ſemblables & comparables, qu’on pourra plus approcher des véritables réſultats. On doit donc regarder comme tel, celui de la déclinaiſon, trouvé en 1780 & 1781, qui eſt 20 degrés 44 minutes & demi, parce qu’il a été conclu de 600 obſervations faites par M. Caſſini & ſes collaborateurs à l’Obſervatoire, depuis le 4 janvier 1780, juſqu’au 11 octobre 1781. Mais, malheureuſement pour les progrès de la ſcience, ces ſortes d’obſervations n’ont pas été juſqu’à préſent aſſez multipliées. Il nous a paru néceſſaire d’offrir à nos lecteurs une eſpèce de diſcuſſion qui peut être appliquée aux autres objets analogues à ceux-ci, afin de déterminer le degré de confiance qu’on doit apporter à un grand nombre d’obſervations météorologiques.

Il y a des phyſiciens qui ont prétendu que la déclinaiſon de l’aimant avoit une période régulière ; que cette période étoit de 1542 ans, ſon moyen mouvement étant d’environ 14 minutes par année ; mais ce mouvement a paru beaucoup moindre à pluſieurs obſervateurs. D’autres ont ſoutenu qu’elle étoit ſujette à pluſieurs anomalies. Une preuve, dit M. le Monnier, que la déclinaiſon n’eſt pas uniforme, c’eſt que 1o. l’aiguille a paru ſtationnaire depuis 1541 juſqu’à la fin du ſiècle. En 1541, elle étoit de 7 degrés au nord-eſt, ſelon le cadran de Bellarmatus.

2o. Qu’en 1766, ſelon le livre de la meſure de la terre de M. Picard, elle ne faiſoit alors pas un tiers de degré tout au plus vers le nord-oueſt, & qu’ainſi elle accéléroit pour lors ſon mouvement de variation vers le nord-oueſt.

3o. Qu’en 18 ans, depuis 1666 juſqu’en 1684, elle ne faiſoit qu’environ 14 minutes par année, à raiſon de 7 degrés deux tiers pendant le tiers d’un ſiècle. Ce qui eſt aſſez conforme à ce qui s’obſervoit déjà en 1666.

4o. Que depuis 1666 juſqu’en 1702, en trente-deux ans, elle a varié aſſez pour qu’on en puiſſe conclure 8 degrés 6 minutes pour le tiers d’un ſiècle, à raiſon de 15 minutes 30 ſecondes par an vers le nord-oueſt.

On ne trouve plus que 12 minutes par an vers le nord-oueſt, ſi l’on prend la durée entière de 1666 juſqu’en 1769 ; la variation ayant augmenté de 20 degrés pendant ce long intervalle de temps.