Page:Encyclopedie Planches volume 2b.djvu/23

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tes de compagnie, afin d’en faire un rapport exact à l’assemblée.

J’observerai ici que dans les hautes futaies, où il y a bien des houx & des fougeres, les sangliers demeurent bien souvent dans ces fougeres où ils font leur nuit; c’est aux veneurs à prendre garde s’ils y voyent entrer le sanglier ou des bêtes de compagnie. Il ne faut pas les approcher à mauvais vent, mais les briser de loin, & prendre les devans de tous côtés. Si le limier n’en rencontre point dès la premiere fois que l’on prend les devans, il faut les reprendre une seconde fois, mais beaucoup plus près de l’endroit où l’on soupçonne le sanglier. Si le limier va bien aux brisées, il est hors de doute que le sanglier est encore dans le lieu de sa retraite; l’on peut alors en toute sûreté en faire son rapport. Pour peu que l’on observe tout ce qu’on a marqué, le rapport ne peut manquer d’être fidele, & on ne fera pas le sanglier autre qu’il n’est.

Des relais, du laisser courre, &c.

Aussi-tôt que le veneur aura fait son rapport, il se préparera pour la chasse & se rendra d’abord dans l’endroit ou sont les chiens pour faire la séparation de sa meute. Il enverra les relais aux endroits ordinaires où se sont les refuites du sanglier, pour en être secouru dans l’occasion; car il est important d’être bien relayé. Le capitaine de l’équipage fera marcher les chiens de meute à la tête desquels se mettra celui qui aura fait le rapport, parce que c’ess à ses brisées que l’on va; c’est toujours à ce dernier à remontrer du sanglier à ceux qui piquent à la queue des chiens, afin de pouvoir le reconnoure, ce qui quelquefois ne se fait pas sans de grandes difficultés; car souvent le sanglier est accompagné d’une laye ou de quelque bête de compagnie: quelquefois même il y a dans la bauge plusieurs sangliers avec celui dont on a remontré d’abord; ils y restent ensemble quelque tems, & lorsque les chiens en approchent, ils partent tous de compagnie, & le sanglier de meute donne ainsi le change aux chiens. En ce cas, il est nécessaire que les piqueurs en revoyent aux brisées, & qu’ils regardent souvent à terre en le faisant chasser.

Lors donc que les piqueurs auront bien revû par les traces, si c’est un ragot, un vieux sanglier, ou une laye, celui qui laisse courre tiendra le trait de son limier tout déployé, & mettra son chien sur les voies aux brisées; il avancera de dix pas dans ces voies, & s’y arrêtant de pié ferme, il criera à son limier, hau valet hauva, la rigaut après après, hau hau: il aura soin de laisser un peu tâter de la voie au limier, ensuite il le fera appuyer sur le trait & le fera suivre, & lorsqu’il reverra des traces de la bête, il criera à haute voix: veleci aller avant, veleci aller, après après valet.

Comme il peut arriver que le sanglier tourne en vermillant dans le sort, quelquefois même près de l’endroit où il veut se mettre à la bauge (ce qui peut faire perdre les voies au limier), il faut le faire revenir pour les rechercher en prenant de petits devans, en lui criant, hourva, hourva hau l’ami va outre. Il est bon aussi de le faire aller devant, pour tâcher de lui faire retrouver les voies, en lui disant, hau rigaut hourva hourva, veleci mon petit. Lorsqu’on le voit retomber sur les voies, il faut lui crier: après mon valet, après hou hou. Enfin dès que le piqueur en aura revû, il criera aussitôt, veleci aller, veleci aller: il répetera souvent ces termes & suivra jusqu’à ce que le sanglier soit lancé. Si le limier menoit jusqu’à la bauge, aussi-tôt que le veneur le verroit partir, il crieroit, velelau, veleci aller, veleci aller, & tout de suite il appelleroit les chiens au son de la trompe;

lorsqu’ils seront arrivés avec les piqueurs, celui qui a laissé courre, sonnera pour faire découpler les chiens; alors tous les piqueurs sonneront aussi & piqueront à la queue des chiens, il les tiendront le plus près qu’ils pourront sans appréhender de passer par les grands forts, ils leur crieront souvent: hou, hou, veleci allez, il dit vrai veleci allez, & ils ne cesseront de sonner pour chiens, de même qu’à la chasse du cerf & du chevreuil; car il n’y a aucune différence. Quant au défaut, lorsque les chiens seront bien ameutés, il faut continuer de sonner encore quelque tems, & ensuite crier aux chiens sans relâche, afin de faire peur au sanglier & l’empêcher par ce moyen de tenir contre les chiens; car autant qu’il en attrape, autant il en estropie: c’est pourquoi il faut toujours les accompagner & leur crier, hau miraut, à suit la chien, fuit la haha, & lorsqu’on voit passer le sanglier, on crie comme on a dit ci-dessus, velelau, &c.

La chasse du sanglier peut durer plus ou moins de tems selon la qualité du sanglier que l’on courre; car si c’est une bête de compagnie, elle pourra faire durer la chasse six ou sept heures, parce qu’étant poursuivie, elle se mêlera avec toutes les bêtes qu’elle rencontrera, ce qui est très-embarrassant pour les veneurs & pour les chiens qui ont alors plus de peine à en reconnoître: d’ailleurs, les bêtes de compagnie étant fortes & peu pesantes, elles sont en état de faire bien du pays. Il n’en est pas de même d’un grand sanglier; sa pesanteur lui est nuisible, il se fait toujours chasser de près, & les chiens ne le perdent gueres de vûe, ce qui fait qu’on en vient à bout dans l’espace d’environ deux heures. De plus, il ne fait point de grands retours, comme les cerfs & les chevreuils, mais seulement un retour à droite ou à gauche, & il se replie toujours du côté où il veut percer. Quelquefois il va de l’extrémité d’une forêt à l’autre; d’autre fois il va battre de grands forts pour chercher à s’accompagner d’autres bêtes, afin de donner le change: ce qui étonne souvent les chiens, mais il y en a toujours parmi eux qui sont fermes dans la voie: ceux-ci ne manquent point de montrer le change & quoique le sanglier parte du fort en compagnie, ils refusent de chasser d’autres bêtes que la leur. Les piqueurs, dans ces circonstances doivent se conduire très-prudemment & se donner de garde de trop exciter leurs chiens, lorsqu’ils reconnoissent qu’ils remontrent bien.

Lorsque le sanglier se sent poussé aux dernieres extrémités, il ne fait plus que tourner, cherchant toujours à se mêler avec quelques bêtes de compagnie. Lorsqu’on l’en sépare, il va battre un autre pays, cherchant toujours à s’accompagner, mais ce n’est que d’une façon assez languissante, parce que sa pesanteur l’accable à la fin; & il s’échauffe, au point que, lorsqu’il rencontre quelque marre, il s’y jette avec ardeur pour s’y rafraîchir. Si par hasard il ne rencontre point d’eau, l’extrème chaleur l’appesantit, & le met hors d’état de courre; alors il se laisse aboyer de près, & au lieu de chercher à fuir, il fait face aux chiens & leur tient tête avec une extrème fureur, il se jette même dessus & les blesse. C’est dans cette occasion que les piqueurs doivent appuyer les chiens & tâcher de faire repartir le sanglier, afin de ménager la vie des chiens. Il est bon même d’empêcher que les chiens n’en approchent de trop près, parce que lorsqu’il est sur ses fins, il ne fait plus que tournoyer, présentant sa hure à tout ce qui l’approche. C’est alors que l’on peut se servir du couteau & le lui plonger dans le corps, comme il est représenté dans la vignette, Pl. IV. Mais il faut que le veneur qui lui sert le coup, soit assez alerte, pour s’esquiver à l’instant d’un autre côté, parce que cet animal tourne tou-