Page:Encyclopedie Planches volume 2b.djvu/24

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jours ses défenses du côté où il se sent blessé. Si cependant le sanglier étoit furieux, au point qu’il y eût à appréhender pour les veneurs & même pour les chiens, il seroit à propos de lui tirer un coup de fusil. C’est à celui qui commande l’équipage, que cet honneur appartient de droit; & il n’y a rien en cela qui blesse les lois de la chasse, parce que le coup de feu est permis, lorsque la vie des veneurs & des chiens est en danger.

Pour les laies & les bêtes de compagnie qui ne peuvent pas blesser, mais qui ne font que fouler du boutoir, il ne faut se servir que du couteau de chasse, le fusil n’étant de mise que dans les dernieres extrémités.

Les piqueurs sonneront aussi-tôt la mort de la bête, & laisseront fouler les chiens en les caressant, en les appellant par leurs noms, & en les enhardissant en ces termes, hou hou petits veleci, veleci donc mes tou tou. Il faut toujours les flatter de la main, particulierement les jeunes chiens; & en cas que ceux-ci ne voulussent pas en approcher, il faut les prendre en les flattant, & les poser sur le sanglier; peu-à-peu ils s’y accoutumeront.

Après que les chiens ont foulé à la tête du sanglier, le premier piqueur leve la trace ou pié droit de devant, & la porte au commandant de l’équipage qui la présente au roi ou au seigneur à qui l’équipage appartient. Ensuite on sonne la retraite pour rappeller les chiens, & on emporte le sanglier.

Avant que de partir, il faut visiter les chiens pour voir ceux qui sont blessés, & les panser. Il faut pour cet effet que les veneurs fassent toujours porter à la chasse tout ce qui est nécessaire pour panser les chiens, & principalement une aiguille, du fil, & quelques morceaux de lard coupés par petites tranches. On met un lardon dans chaque plaie que l’on recoût avec du fil double, & l’on fait un nœud à chaque point: ce lardon humecte la plaie, & lui donne l’onction nécessaire; outre cela le chien, de son côté, coopere à sa guérison en léchant souvent sa plaie. Si, par hasard elle venoit à se r’ouvrir, soit naturellement, soit parce que le chien auroit cassé le fil, il faut remettre un autre lardon, & la recoudre de même: mais si la plaie étoit trop enflée pour être recousue, on fait fondre alors du vieux lard piqué d’avoine, & on en frotte la plaie avec une plume, ce que l’on reitere tous les jours jusqu’à ce que la plaie soit guérie. Pour ceux qui ne sont pas considérablement blessés, on peut attendre le retour de la chasse pour les panser: il suffit de laver leurs plaies avec du vin un peu chaud; & l’on a soin, lorsqu’ils sont au chenil, de leur donner de la paille fraîche & beaucoup d’eau.

De la curée du sanglier.

Voici ce qu’il faut observer à la curée du sanglier.

On rompt d’abord dans des baquets grand nombre de morceaux de pain, à proportion de la quantité des chiens; on fait ensuite chauffer de l’eau dans une grande chaudiere; on y met trois ou quatre livres de graisse au moins; pendant que l’eau chauffe, on dépouille le sanglier, pour en avoir la fressure, & après qu’on en a ôté le fiel, on la coupe par petits morceaux pour les mettre bouillir dans la chaudiere. Lorsque le tout a suffisamment bouilli, on le verse de la chaudiere dans les baquets, & on le remue avec des bâtons. Puis, quand le pain est bien trempé, on renverse les baquets sur le drap qui sert à la curée, & qui est un drap fait exprès de grosse toile de la longueur de cinq ou six aunes. On remue bien cette mouée pour l’étendre sur le drap. Pendant qu’elle refroidit, le maître-valet de chiens apporte nombre

de houssines qui sont distribuées par le capitaine ou le lieutenant de l’équipage, selon la qualité des personnes qui assistent à la curée. S’il n’y avoit que le commandant & les piqueurs à la curée, ce seroit au premier piqueur à lui présenter une houssine & une à chacun des autres piqueurs; pour les valets de chiens par quartier, ce sont les petits-valets de chiens qui leur en présentent. Aussi-tôt que la mouée est prête, le commandant sonne de la trompe, & tous les piqueurs sonnent en même tems: le valet de chiens commandé pour le chenil, ouvre la porte, aux premiers sons, & laisse sortir tous les chiens, excepté cependant les plus gras, qu’on ne laisse aller à la mouée qu’à la fin de la curée: tout le tems qu’elle dure, on sonne de la trompe autour des chiens, & on les caresse en se servant des mêmes termes qu’on emploie à la chasse. Il est à observer que les chiens ne mangent pas du sanglier avec autant d’avidité que d’autre viande. Il ne faut pas même que ce qu’on leur en donne soit crû, parce que cela pourroit les dégoûter: de sorte que, si dans un certain tems, on veut leur faire manger d’autres endroits du sanglier que la fressure, il faut avoir soin de couper par quartiers ce qu’on leur destine, & le faire bouillir dans de l’eau pour le mêler avec le pain de la mouée.
Comment il faut lever la trace du sanglier.

C’est ordinairement le premier piqueur qui doit lever la trace du sanglier; les jeunes veneurs ne peuvent rien faire de mieux que d’examiner avec attention comment il s’y prend, afin de faire de même dans l’occasion. C’est toujours la trace droite qu’on doit lever; pour cela, on perce d’abord avec un couteau au-travers de la jambe, entre l’os & les nerfs au-dessous du genouil; on fend ensuite la peau jusqu’au joint du bas de la jambe au-dessus des gardes; on coupe dans la jointure tous les petits filamens de nerfs qui y sont; après cela on renverse la trace en arriere pour la déboîter. Il faut toujours avoir soin d’y laisser la peau qui couvre le dessus de la jambe & qui va jusqu’au genouil, c’est là qu’il faut la couper. Lorsque la trace est levée, on fend la peau dans le milieu pour y passer les nerfs & la moitié de la peau de dessous qui doit toujours être renversée par-dessus les gardes; on fend ensuite les nerfs & l’autre moitié de la peau qui y tient, & on les passe deux ou trois fois l’un dans l’autre: lorsque cela est fait, la trace est en état d’être présentée.

Maniere de dépouiller le sanglier.

On commence par lever la hure, en faisant une incision par le col au défaut des épaules, & là on coupe le joint entre le col & les épaules. La hure levée, il faut mettre le sanglier sur le dos; on fait des incisions autour des jambes au-dessous du genouil dont on fend la peau au-dedans des jambes de devant jusqu’à la gorge; on fait ensuite une incision depuis la gorge jusqu’à l’entre-deux des cuisses, & une autre à chacune des jambes de derriere au-dessous des genouils, on en fend la peau dans toute la longueur du jarret droit, en montant le long de la culotte jusqu’à la queue; cela fait, on commence à habiller la bête par les cuisses & puis par le ventre, jusqu’à ce que les épaules & le corps soient tout dépouillés; on fend ensuite le ventre, on ôte la panse & les dedans, comme la fressure, le cœur & la panne, de laquelle on peut faire de bon boudin en la mêlant avec le sang; on fait ensuite des andouilles avec les boyaux, mais elles sont plus noires que celles de cochon. Si c’est dans le tems de la porchaison, on peut faire de bons jambons des