Page:Envers de la guerre - tome 2-1916-1918.djvu/117

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frontières et régimes douaniers, on reste effaré du contraste.

— Mon fils, en Flandre, lie conversation avec un soldat américain : ce qui a jeté son pays dans la guerre, c’est le récit des atrocités allemandes.

— Montmartre, huit heures et demie du soir. D’innombrables tavernes et cabarets sont ouverts. À partir du haut de la rue des Martyrs, une bâfrerie échevelée. Des mâles inquiétants, en civil, palmés de croix de guerre, se vautrent près de femmes avachies et peintes grossièrement, dans des attitudes retrouvées de seigneurs et maîtres.

— Tristan me rapporte cette rumeur. Le président Wilson tenterait une suprême démarche près de l’Allemagne quand de forts contingents américains auraient débarqué : « Nous allons sacrifier 2 millions d’existences et 100 milliards. Rendez la Pologne, le Trentin, l’Alsace-Lorraine et nous paierons les dégâts. »

— Les soldats se plaignent de ce que le repos soit pour eux la reprise de la vie de caserne, marches brisantes, exercices.

— Un Allemand maudit la guerre avec véhémence dans un livre appelé : « Mère ! » La Censure française en interdit la reproduction. Elle ne veut pas qu’on éclabousse la guerre. Pas de tache sur la statue.

— L’affreux de l’excitation à la haine de races apparaît quand on sent comme elle est transitoire. Notre enfance fut bercée du patriotisme de Vercingétorix, défendant la Gaule contre les Latins. Et aujourd’hui, nous nous vantons d’être des Latins, on nous fait sucer le latin à la mamelle ! Et rappelez-vous la haine contre l’Anglais, depuis Jeanne d’Arc jusqu’à Fachoda… Et ce nom de Français, dont nous sommes si fiers, ne nous marque-t-il pas à l’em-