Page:Envers de la guerre - tome 2-1916-1918.djvu/18

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Le 11. Caillaux dit à l’un de ses collègues que les deux grands malheurs de la guerre sont l’assassinat de Jaurès et la folie de Clemenceau. Une quinzaine de députés viennent successivement serrer la main de Caillaux et, à propos des incidents de Vichy, lui disent en termes à peu près identiques : « Ils veulent donc faire de vous un président du Conseil ? Trois affaires pareilles et cela y sera. » Caillaux dit qu’il a couru à Vichy un réel danger.

— Tristan Bernard, parlant de la douzaine de vides à l’Académie que l’on devra combler après la guerre, dit qu’il faudra fabriquer les académiciens en série.

— 16. Un exemple de la coupable partialité des journaux. Aux deux premières pages, en gros titres, ils célèbrent des victoires alliées. Et en troisième page, en deux lignes, ils donnent le communiqué roumain, qui annonce une retraite roumaine en Dobroudja. Ce recul passe inaperçu à cause de la façon matérielle dont il est présenté. Voilà le crime. La presse française n’a jamais montré la vérité, même la vérité possible avec la censure. Ç’a été une artillerie lourde de grands mots, d’espoirs énormes, un dénigrement systématique de l’adversaire, un parti pris de cacher l’horreur, la tristesse de la guerre, de la montrer en beauté !

— Le 16. Sur le boulevard, après-midi, c’est un défilé d’officiers blessés, décorés, qui semble venir chercher là, dans la caresse des regards, une récompense.

— On fait la queue dans les épiceries pour avoir du sucre. On ne délivre le beurre que par quart de livre. Plus d’oranges. C’est comique, quand on pense à cette fameuse pénurie allemande dont on se gausse.

— Le 16. De dix heures du soir à deux heures