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Page:Erckmann–Chatrian — Histoire d’un paysan.djvu/240

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Histoire d’un paysan.

Custine était entré dans la ville. (Page 226.)
Custine était entré dans la ville. (Page 226.)

Moi je n’en revenais pas ; et lorsque nous arrivâmes devant la cour du grand hôtel des postes, les fenêtres éclairées de haut en bas et la cour encombrée de hussards, je ne savais plus que penser.

L’officier de garde lut mon ordre et me fit conduire au premier, dans un grand corridor, où les domestiques de l’hôtel allaient et venaient en courant, avec des plats de viande et des paniers de vin. Notre général Custine, le meilleur vivant de son armée, traitait les commissares et l’état-major de la place ; c’était un ancien noble, il s’y connaissait.

L’un des serviteurs, surpris de me voir là, me demanda ce que je voulais ; je lui dis que les commissaires m’avaient fait demander, et tout de suite il m’ouvrit une grande

chambre, à gauche du corridor, en me disant :

« Entrez ! »

J’entrai donc dans cette chambre, où se trouvait une lampe allumée sur une table ronde. À droite, dans la salle voisine, j’entendais parler et rire, des verres et des assiettes tinter comme pendant un festin. Et comme j’étais là depuis une minute, bien étonné de ne voir personne, tout à coup la porte s’ouvrit, et le citoyen Carnot entra, son écharpe autour des reins, en me demandant d’un air de brave homme qu’il était :

« Vous êtes Michel Bastien, le futur gendre de Chauvel ?

— Oui, commandant, lui répondis-je tout troublé.

— Ne vous étonnez pas, dit-il en, me tendant