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Page:Erckmann–Chatrian — Histoire d’un paysan.djvu/264

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Histoire d’un paysan.

Les tueurs à 6 livres par jour. (Page 244.)
Les tueurs à 6 livres par jour. (Page 244.)

« Écoutez donc !… Écoutez donc, que diable ! Que chacun pense ce qu’il voudra !… »

Il faut savoir que la Convention, après avoir proclamé la république, s’était tout de suite divisée en trois partis : celui des montagnards, celui des girondins et celui du Marais.

Les montagnards voulaient la république une et indivisible, l’égalité des droits pour tous et la destruction de tout ce qui restait du vieux régime. Ils voulaient d’abord l’égalité et s’appuyaient naturellement sur le peuple, qui tenait à cela bien plus encore qu’à la liberté, parce qu’il avait cruellement souffert durant des siècles de toutes les inégalités qu’on voyait en France avant 89, et qu’enfin l’égalité c’est la justice.

Les girondins, eux — j’entends les républicains de la Gironde, car dans ce parti se trou-

vaient

beaucoup de royalistes qui n’avaient fait que changer leur cocarde, en attendant l’occasion de trahir la république, — les vrais girondins mettaient la liberté par-dessus tout. Ils représentaient la grosse bourgeoisie, le grand commerce de mer, les grandes fabrications, enfin les richesses de toutes sortes, et voulaient une république où les bourgeois mèneraient tout. — Et comme le peuple de Paris les gênait, comme il avait poussé la Constituante et la Législative en avant, chaque fois que ces assemblées avaient essayé de reculer, ils pensaient à transporter la Convention en province, soit à Bourges, soit ailleurs, pour se débarrasser du peuple qui soutenait les montagnards, et faire voter à leur majorité le gouvernement qui leur convenait.