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L’AMI FRITZ.

sait ; c’était un exemple vivant de la bonne humeur que vous procurent le bon sens et la sagesse humaine, et naturellement il avait des amis, ayant des écus.

On ne pouvait être plus content que Fritz, mais ce n’était pas tout à fait sans peine, car je vous laisse à penser les propositions de mariage innombrables qu’il avait dû refuser durant ces quinze ans ; je vous laisse à penser toutes les veuves et toutes les jeunes filles qui avaient voulu se dévouer à son bonheur ; toutes les ruses des bonnes mères de famille qui, de mois en mois et d’année en année, avaient essayé de l’attirer dans leur maison, et de le faire se décider en faveur de Charlotte ou de Gretchen ; non, ce n’est pas sans peine que Kobus avait sauvé sa liberté de cette conspiration universelle.

Il y avait surtout le vieux rabbin, David Sichel, — le plus grand arrangeur de mariages qu’on ait jamais vu dans ce bas monde, — il y avait surtout ce vieux rabbin qui s’acharnait à vouloir marier Fritz. On aurait dit que son honneur était engagé dans le succès de l’affaire. Et le pire, c’est que Kobus aimait beaucoup ce vieux David ; il l’aimait pour l’avoir vu dès son enfance assis du matin au soir chez le juge de paix, son respectable père ; pour l’avoir entendu nasiller, discuter et crier