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L’AMI FRITZ.

qu’avant-hier, comme je passais devant sa maison, dans la rue de l’Arsenal, voilà qu’elle se penche à la fenêtre et me dit : « Hé ! c’est monsieur le rabbin Sichel ; que j’ai de plaisir à vous voir, mon cher monsieur Sichel ! » Alors, Kobus, moi tout surpris, je m’arrête et je lui réponds en souriant :

« Comment un vieux bonhomme tel que David Sichel peut-il charmer d’aussi beaux yeux, madame Roemer ? Non, non, cela n’est pas possible, je vois que c’est par bonté d’âme que vous dites ces choses ! » Et vraiment, Kobus, elle est bonne et gracieuse, et puis elle a de l’esprit ; elle est, selon les paroles du Cantique des cantiques, comme la rose de Sârron et le muguet des vallées, » disait le vieux rabbin en s’animant de plus en plus.

Mais, voyant Fritz sourire, il s’interrompait en balançant la tête, et s’écriait :

« Tu ris… il faut toujours que tu ries ! Est-ce une manière de converser, cela ? Voyons, n’est-elle pas ce que je dis… ai-je raison ?

— Elle est encore mille fois plus belle, répondait Kobus ; seulement raconte-moi le reste, elle t’a fait entrer chez elle, n’est-ce pas… elle veut se remarier ?

— Oui.

— Ah ! bon, ça fait la vingt-troisième…