dans ses fondements. Dans la rue, les boulets enlevaient des files de Prussiens et de Russes, comme les coups de faux enlèvent l’herbe : c’était leur tour de serrer les rangs.
J’entendais aussi, derrière nous, l’artillerie ennemie répondre, et je pensais : « Mon Dieu ! mon Dieu ! pourvu maintenant que les Français l’emportent, leurs pauvres blessés seront recueillis, au lieu que ces Prussiens et ces Cosaques songeraient d’abord aux leurs et nous laisseraient tous périr. »
Je ne faisais plus attention au sergent, je ne regardais que les canonniers prussiens charger leurs pièces, pointer et tirer, en les maudissant au fond de mon âme ; et j’écoutais avec ravissement les cris de Vive l’Empereur ! qui commençaient à monter de la vallée, et qu’on entendait dans l’intervalle des détonations de l’artillerie.
Enfin, au bout de vingt minutes, les Prussiens et les Russes se mirent à reculer ; ils repassaient en foule par la ruelle où nous étions pour se jeter sur la côte ; les cris de Vive l’Empereur ! se rapprochaient, les canonniers, devant nous, se dépêchaient comme des forcenés, quand trois ou quatre boulets arrivèrent cassant une roue et les couvrant de terre. Une pièce tomba sur le côté ; deux artilleurs étaient tués