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Le brigadier Frédéric.

répondre que la canaille seule accepte le titre de brave homme, en manquant à l’honneur ; mais je retenais ma langue, ne voulant pas engager les camarades, dont plusieurs étaient surchargés d’enfants ; la responsabilité me paraissait trop forte.

M. l’Oberfœrster, ayant fini, nous observa d’un œil plus fixe, moi particulièrement, en disant :

« Eh bien ! vous pouvez parler ; je vous autorise à parler. »

Alors je répondis :

« Monsieur l’Oberfœrster, comme le plus vieux forestier des trois brigades, mes camarades m’ont chargé de parler pour tous ; mais la proposition que vous venez de nous faire est grave ; je crois que chacun demandera du temps pour réfléchir. »

Tous inclinèrent la tête ; et lui, vraiment étonné, car il avait cru sans doute que l’augmentation des appointements déciderait de tout, resta plus d’une minute les yeux écarquillés, me regardant comme s’il avait vu quelque chose d’extraordinaire ; puis il en fit autant pour les autres, et, fronçant les sourcils, il dit d’un ton rude :