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Le brigadier Frédéric.

maison, soit du dehors !… Ah ! oui, je puis bien le dire, c’était une belle créature, douce et forte.

Souvent, en rentrant à la nuit et la voyant au haut de l’escalier, me faire signe qu’on m’attendait depuis longtemps pour le souper, puis descendre les marches et me tendre ses bonnes joues, souvent j’ai pensé :

« Elle est encore plus belle que sa mère au même âge ; elle a le même bon sens ; dans ton malheur, ne te plains pas, Frédéric, car beaucoup d’autres envieraient ton sort d’avoir une enfant pareille, qui te donne tant de satisfaction. Une seule chose me faisait venir des larmes, c’est quand je songeais à ma femme, alors je m’écriais :

« Ah ! si Catherine pouvait revenir pour la voir, elle serait bien heureuse ! »

Vers le même temps, d’autres idées me passaient par l’esprit, l’époque de ma retraite approchait, et comme Marie-Rose entrait dans sa dix-septième année, je songeais à lui trouver un brave garçon de la partie forestière, chez lequel je finirais tranquillement mes jours, au milieu de mes enfants et de mes petits-enfants, et qui, prenant ma place, me respecterait comme