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Le brigadier Frédéric.

Puis le printemps revint comme les autres années ; les hêtres et les sapins se remirent à pousser leurs bourgeons ; on ouvrit les fenêtres pour renouveler l’air ; le grand poirier devant la porte se couvrit de fleurs ; tous les oiseaux du ciel recommencèrent à chanter, à se poursuivre, à nicher, comme si rien ne s’était passé.

Je repris aussi mon travail, accompagnant monsieur le garde général Rameau dans ses tournées, pour l’aménagement des coupes, surveillant l’exploitation au loin, partant de grand matin et revenant tard, au dernier chant des hautes-grives.

Le chagrin me suivait partout, et pourtant j’avais encore la consolation de voir Marie-Rose grandir en force et en beauté d’une façon vraiment merveilleuse.

Ce n’est pas, Georges, parce que j’étais son père que je dis cela ; mais on aurait cherché longtemps de Saverne à Lutzelstein, dans nos vallées, avant de rencontrer une jeune fille aussi fraîche, la taille aussi bien prise, l’air aussi honnête, avec d’aussi beaux yeux bleus et d’aussi magnifiques cheveux blonds. Et comme elle s’entendait à tous les ouvrages, soit de la