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Le brigadier Frédéric.

un peu cassée, car elle avait près de soixante ans :

« Bonne route, monsieur le brigadier ! N’oubliez pas Mlle Marie-Rose et la grand’mère !

— Soyez tranquille, je n’oublierai rien. »

Elle faisait signe de la tête que c’était bien, et je partais en allongeant le pas.

Il m’arrivait aussi quelquefois, quand ma tournée finissait avant cinq heures, de trouver Jean aux environs de la maison, de l’autre côté du vallon, dans le sentier qui longeait notre verger, et Marie-Rose dans le jardin, à cueillir des légumes. Ils étaient chacun de son côté et se causaient par-dessus la haie, sans en avoir l’air, ils s’en racontaient !

Cela me rappelait le bon temps où je faisais ma cour à Catherine, et j’arrivais tout doucement par les bruyères, jusqu’à vingt pas derrière eux, criant :

« Hé ! hé ! Jean Merlin, c’est comme cela qu’on remplit son service ! Je vous attrape à dire de belles paroles aux jeunes filles ! »

Alors il se retournait, et je voyais son air embarrassé.

« Pardon, brigadier, disait-il, je viens pour