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Le brigadier Frédéric.

que nous avait dit un an avant le capitaine Rondeau me revenait ; les bûcherons qu’il avait fait arrêter à Lutzelbourg défilaient devant mes yeux ; et puis j’étais humilié d’apprendre que des Badois et des Bavarois avaient battu des Français à la première rencontre. Je pensais bien qu’ils s’étaient réunis dix contre un, mais le chagrin n’en était pas moins grand.

Ce fut notre première mauvaise nuit ; je ne pouvais pas dormir, et j’entendais aussi Marie-Rose, dans sa petite chambre à côté, se lever, ouvrir la fenêtre et regarder.

Tout dehors se taisait comme si rien n’était arrivé, pas une brindille ne remuait, tant l’air était calme ; quelques cigales nasillaient même sur la terre encore chaude six heures après le coucher du soleil, et le long de la rivière, des grenouilles faisaient entendre leur chant traînard.

L’agitation intérieure m’empêchait de dormir. Sur les quatre heures, Ragot se mit à japper en bas dans l’allée ; quelqu’un toquait contre la porte. Je m’habillai, et deux minutes après je descendais ouvrir.

Un homme, le fils Klein-Nickel de la Petite-