Page:Ernest Cœurderoy - Hurrah !!!.djvu/127

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la Matière et la Pensée se confondent jusqu’à ne nous laisser aucun doute sur la division purement hypothétique et arbitraire que nous faisons entr’elles. Je pense, donc j’existe, fit Descartes naïvement. Je pense, donc la matière peut penser, dit Hobbes, un grand philosophe celui-là !

Faut-il d’autres preuves que ce dualisme est tout-à-fait arbitraire, et créé par notre manie raisonnante ?

Nous disons, par exemple, que l’atome, ou dernier terme de la matière, est doué d’une force de cohésion, de pesanteur et d’impénétrabilité qui le distingue du rêve, le dernier terme de la pensée, fugitif, subtil, vaporeux à l’infini.

Or, je le demande, comment constater, d’une part, l’impénétrabilité, la cohésion et la pesanteur du plus petit des atomes que nous puissions imaginer ? Comment le concevoir même plus facilement que la pensée la plus fugitive ? Comment le séparer des impressions physiques qu’il a produit et de celles qu’il fera naître ?

Qu’est-ce qu’une Force inconnue, première, qui dirige donc les mondes les plus grands et le plus petit grain de monde ? C’est une pensée. — Et d’autre part, qu’est-ce qu’une pensée qui se traduit mathématiquement par des chiffres et des figures ? C’est bien une force.

Sans la force visible effective et secondaire du Monde, comment nous serait-il possible de supposer la force invisible, causaliste et première que nous appelons Dieu ? — Et d’autre part, sans cette hypothèse immatérielle et impalpable que nous appelons Dieu[1], comment nous ren-

  1. Dieu ne peut être encore pour nous qu’une hypothèse, une inconnue. Dieu n’existe que dans notre pensée, en vertu de notre avidité de découvertes et de nos impérieux besoins de nouvelles ressources. Dieu c’est une X — rien de plus — l’X du problème sur lequel l’Humanité travaille depuis six mille ans et dont la solution le presse toujours. Le jour de cette solution marquera le superbe triomphe du Peuple-Homme et la défaite lamentable du Roi-Dieu. Mais quand il aura tué son Dieu, le Peuple-Homme survivra-t-il à cette mort ? Pour ma part, je ne le crois pas, et j’en donnerai mes raisons plus tard. J’affirme seulement que l’Humanité tuera son Dieu, au risque de mourir sur ses dépouilles opimes. — Et roule, Révolution !!