Page:Ernest Cœurderoy - Hurrah !!!.djvu/180

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

chaque commissaire de police est un souverain, et le souverain, un commissaire de police couronné ? Qui de nous ne s’est pas livré à tous les entraînements pour oublier cet enfer frappé à la glace, pour obtenir quelques moments d’ivresse et de distraction ? Nous voyons maintenant les choses sous une autre face, nous envisageons l’histoire russe d’une autre manière : mais il n’y a pas de raison pour nous rétracter ou nous repentir de ces moments de désespoir. Nous les avons payé trop cher pour les céder ; ils ont été notre droit, notre protestation ; ils nous ont sauvés. » (Du développement des idées révolutionnaires en Russie, par A. Herzen.)

C’est dans la jeunesse qu’il faut étudier le caractère d’un peuple neuf, caractère tout d’aspirations. Or je soutiens qu’il y a dans la jeunesse slave une originalité, une sève, un entraînement, un mobilisme, une virtualité d’avenir qu’on chercherait en vain chez nous. — J’en sais quelque chose, moi qui ai fait partie de ce comité socialiste des écoles qui ne comptait pas plus de quinze membres et provoquait le sourire et les sarcasmes des étudiants de Paris, âmes stériles et froides, quintessence sublimée de bourgeoisie !

Chez les jeunes Slaves, le sentiment de la fierté et de la justice est naturel ; ce sont des poètes, des orateurs populaires, des chefs de conjuration, des publicistes : toujours des jeunes gens, qui l’expriment. Et la Poésie, l’Éloquence, l’Enthousiasme, l’Art ne peuvent être que les interprètes des idées qui courent à la surface d’une nation. Et les précurseurs slaves sont en grand nombre ! — Tandis que chez nous, s’il se trouve un homme qui ose revendiquer pour le Droit, cet homme est seul ; c’est un économiste, un philosophe, un abstracteur, qui travaille sur des pensées enfouies dans la profondeur des masses.