Page:Ernest Cœurderoy - Hurrah !!!.djvu/236

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entre toujours dans la grande œuvre de l’Humanité. Une nation n’est rien qu’un des anneaux de la chaîne infinie qui rattache les temps et les races. Tous les hommes sont faits de sang, et tous les anneaux, de fer.


V.   Hélas ! pauvres mortels, que faisons-nous contre la Révolution ? Pendant que nous l’analysons et la définissons, elle nous emporte dans son orbe éternel, et nous sommes bien forcés de l’accepter et de nous y accommoder de notre mieux. Les gouvernants qui décrètent contre les révolutions et les généraux qui les sabrent ressemblent fort aux fourmis qui transportent, à grands efforts de reins, des brins de paille, et croient, par leur travail, modifier l’ordre de l’univers. Ceux qui provoquent les révolutions et ceux qui les refoulent ne sont que des instruments ; le fait révolutionnaire n’est qu’un brillant feu d’artifice qui fait resplendir davantage la tradition résumée la veille, poursuivie le lendemain.


VI.   Je ne sache pas d’événement au monde sur lequel les hommes aient aussi peu d’influence que sur la venue d’une révolution profonde. Les vaines impatiences des oppositions ne la hâtent pas davantage que ne la retardent les aveugles fureurs des gouvernements. Si les politiques purs avaient observé comme moi combien il faut de temps à la maladie pour désorganiser une partie de notre corps, et combien à la convalescence pour réparer ce désordre, ils dépenseraient moins d’argent, républicains contre monarchistes, à entretenir des mouchards.


VII.   Toute société a une phase d’accroissement et une phase de décroissance. Dans la première, ses forces se concentrent ; dans la seconde, elles se dissocient. Dans la première, cette société résume la tradition ; dans la seconde, elle prodigue l’utopie.