Page:Ernest Cœurderoy - Hurrah !!!.djvu/264

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violées et des familles en deuil. Avant tout, il faut que les éléments sociaux s’équilibrent et que l’humanité vive. Et puisque nos institutions ne permettent pas au Progrès de s’accomplir par une évolution ménagée, que nos institutions soient brisées ! — Que l’Épée, qui ne brille que dans le sang, tranche les mains avares des siècles précédents ! — Que la Guerre, la vieille sourde en culottes de peau, frappe à coups redoublés parmi les hommes ; qu’elle jouisse de son reste, comme la fille ardente qu’on poursuit après qu’elle a fui le toit paternel.

Après tout, « la guerre, comme dit J. de Maistre, la guerre n’est pas un aussi grand mal qu’on le croit : du moins c’est un de ces maux qui produisent des compensations. D’abord, lorsque l’âme humaine a perdu son ressort par la mollesse, l’incrédulité et les vices gangreneux qui suivent l’excès de la Civilisation, elle ne peut être retrempée que dans le sang. Serait-il possible que l’effusion du sang humain n’eût pas une grande cause et de grands effets ? Qu’on y réfléchisse : l’histoire et la fable, les découvertes de la physiologie moderne et les traditions antiques se réunissent pour fournir des matériaux à ces méditations. »


XXIV.   Étrange susceptibilité nerveuse ! Les civilisés traitent de barbares les Indiens qui se brûlent sur les bûchers ; ils maudissent le fanatisme, la superstition, l’ignorance, et leurs cheveux se dressent sous leurs perruques à l’idée des sacrifices humains ! Esclaves à bottes vernies, mais que se fait-il donc autre chose en Orient que des hécatombes humaines ? À quelle haute raison obéissez-vous quand vous versez votre sang pour les querelles de vos maîtres ? Et n’êtes-vous pas plus coupables mille fois en vous égorgeant ainsi, vous, savants, frisés et policés, que ne le sont des hommes primitifs ?