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plus grands excès trouvent leur remède dans le paisible cours des nuits. La vie est un équilibre entre la veille et le repos. Il n’est pas besoin de philosophie et de science pour nous apprendre que le sommeil est la meilleure moitié de l’existence : à cela suffisent nos sensations.

Le sommeil, c’est toujours la vie. Il diffère de la veille en ceci seulement que les forces organiques dominent la scène occupée souverainement pendant la veille par les forces animiques.


II.   Un homme est enseveli. — Cette fois, pour tout observateur, superficiel ou profond, cette fois-là, cet homme n’est plus. Et cependant, il n’y a pas de différence entre l’homme au sépulcre et l’homme au lit, sinon que le premier est sous terre et que le second est dessus. Dans leur essence le Sommeil et la Mort ne diffèrent pas. Dans le langage n’appelle-t-on pas le Sommeil frère de la Mort ; et la Mort, le long, le grand, le dernier, l’éternel sommeil ? Et les analogies dont notre langage tient compte ne sont-elles pas au fond de notre pensée ?

L’homme enseveli, comme l’homme qui dort, est étendu sans mouvement, sans connaissance, privé de sentiment et de sensation : il renaît, comme lui, à l’existence relative, dès qu’il s’est assez reposé. Chez le mort, il est vrai, l’insensibilité au monde extérieur est complète, et toute manifestation d’existence sus-terrestre a cessé.

Cela suffit-il pour affirmer que cet homme soit mort dans le sens que nous prêtons vulgairement à ce mot : c’est-à-dire qu’il soit inutilisé, détruit à tout jamais, et que dans l’éternité, ses éléments constituants ne soient plus susceptibles de régénération ? — Je réponds : non ; et quiconque voudra s’élever à des considérations générales sur le temps et l’espace dira, comme moi, que la mort, semblable au sommeil, n’est rien d’autre que la pré-