Page:Ernest Cœurderoy - Hurrah !!!.djvu/94

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sur toi tant que tu vénéreras Dieu ! cela te donnera droit à l’aumône des Jésuites…

La Fatalité pèse sur moi par tous les objets extérieurs à moi ; mais je lui suis très à charge par la seule force de ma volonté. Je reconnais l’existence de la Fatalité sans renoncer à la conscience de mon libre arbitre. Je fais la part de Dieu… et ma part !

Le nom sous lequel je désigne cette force supérieure ne l’empêche pas de s’exercer sur moi ; mais je ne cesse pas non plus de me raidir contre elle, de quelque nom que l’appellent les Pharisiens, les Scribes et les Docteurs de la Loi. Dieu ou Satan, ce n’est jamais rien de plus qu’un fait, une majorité qui m’obsède et qui peut changer demain. Je ne subis cela qu’à mon corps défendant.

Je n’ai pas peur de Dieu, la grande ombre chinoise que les curés nous font passer sur le ciel d’azur ; je n’en ai pas plus peur que d’un mien cousin, autrefois mon adversaire aux billes, que j’ai revu dernièrement déformé par la grande robe noire. Dieu change plus souvent de formes qu’un député, d’opinions, ou un roi constitutionnel, de ministres. Tous les êtres de l’univers sont Dieux ou mortels, les uns par rapport aux autres, selon le mode d’association dans lequel ils se trouvent engagés. Il y a, de par le monde, des révolutions qui détrônent des Dieux avec la même facilité que nous détrônons des hommes.

La Russie est aujourd’hui le dieu de l’Europe : elle la domine de fait. Eh bien ! je n’ai pas peur du dieu de l’Europe actuelle, parce que le jour où sa force deviendra incompatible avec le libre développement de l’homme, cette force sera détruite. — Dieu propose et l’Homme dispose, voilà ce qui est vrai.