faire oublier le jeune Israël du temps des patriarches, l’Israël tribu arabe, dont l’esprit se continua surtout dans le royaume du Nord, et au sein duquel s’épanouit librement toute une vie profane, éclipsée dans la suite par l’éclat incomparable de la vocation religieuse.
Au point de vue d’une philosophie éclairée, ce fut donc une erreur de croire que le Cantique, pour ne pas être un livre scandaleux, devait être un livre mystique. Mais la conscience de l’humanité ne se trompe jamais tout à fait. Telle est la force du sentiment religieux qu’il sait donner à des contre-sens de la beauté et du charme. Le sens mystique est faux philologiquement, mais il est vrai religieusement ; il correspond à cette grande sanctification de l’amour que le christianisme a inaugurée. La Sulamite a pris le voile chrétien ; sous ce voile elle est belle encore. Comment regretter, en effet, cette guirlande de poétiques mensonges que l’imagination chrétienne a tressée à l’objet de ses rêves favoris, quand on