songe que sans ce réseau de méprises pieuses les âmes mystiques n’eussent pas eu leur livre saint ? Que d’amours purs ont vécu de ce beau Vulnerasti cor meum, que l’Église chante dans ses fêtes ! Ces litanies de la Vierge et ces hymnes composées tout entières d’images mélancoliques ou brûlantes empruntées à l’idylle sacrée[1], que de larmes (les meilleures peut-être qui ont coulé ici-bas) elles ont fait verser ! Ajoutons que l’interprétation chrétienne a donné au Cantique ce qui lui manque dans l’original, de la transparence et de la délicatesse. La Sulamite chrétienne est bien plus distinguée que l’antique vierge de la tribu d’Issachar ; la finesse de sentiment des races nouvelles a corrigé ce que le génie hébreu a d’un peu mat et d’un peu lourd.
Sur la trame de l’ancien Cantique s’est ainsi formé un livre tout différent de celui des Hébreux,
- ↑ Voir surtout certaines hymnes d’Adam de Saint-Victor (t. II, p. 189, 340, édit. Gautier) et de son école (Pitra, Spicil. Solesm. III, p. 451).