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DE CHARLES DE L'ESCLUSE

Sultan, Auger de Bousbecq, baron de Sonneck et Charles Rym. « Cette espèce, dit Charles de l’Escluse, se propage très facilement par ses rejets : je la distribuai le plus qu’il me fut possible, à ce point qu’à présent elle est devenue très commune chez tous les amateurs de plantes.[1] » L’Acorus Calamus avait alors la réputation d’étre une plante antiseptique[2] et Charles de l’Escluse ne manque pas de faire remarquer que cette espèce s’était tellement répandue un peu plus tard que, chaque année, les pharmaciens en vendaient des centaines de livres et que cet objet de commerce n’était pas à dédaigner.

Nous pourrons encore citer le Thuya occidentalis, qu’il répandit en Belgique, et en particulier le Laurier-Cerise (Prunus Laurocerasus), que Belon avait observé antérieurement dans le jardin du Prince Doria, à Gènes, mais que Charles de l’Escluse cultiva et propagea lui-même en Autriche et en Allemagne. Voici comment se fit assez difficilement cette introduction, d’après notre savant botaniste.

« Vers le commencement de l’année 1576, dit Clusius, l’ill. Seigneur David Ungnad, ambassadeur de l’Empereur auprès du Sultan, m’envoya un pied de ce Laurier-Cerise, dont le tronc avait la grosseur du bras et la hauteur d’un homme, et qui était accompagné d’autres rares arbrisseaux. Mais l’hiver fut très froid et le convoyeur de ces plantes négligea de leur donner les soins nécessaires : toutes périrent en route jusqu’à la racine, excepté un Marronnier[3], et le Laurier-Cerise ; il s’en fallut de peu même que ce dernier ne fût perdu. Je le mis en cave dans le vase même qui avait servi à l’apporter et avec la terre qui s’y trouvait. Au mois d’Avril suivant, lorsque je le tirai du vase qui le contenait, il n’offrait plus que des rameaux tout à fait desséchés : je le taillais jusqu’au vif et je le plaçais dans un autre vase à l’ombre, car je craignais qu’étant brûlé par les rayons solaires il ne repoussât plus difficilement. Or il commença enfin vers l’automne à émettre une seconde racine et quelques rejetons : j’en retranchai

  1. Rar. plant. Hist., p. 230.
  2. Le Dr Bernard Paludanus avait appris à Clusius que cette propriété antiseptique avait été attribuée par les Tartares à cette plante, qui jouissait de la même réputation à Constantinople.
  3. Charles de l’Escluse concourut également à l’introduction en Europe du Marronnier (Æsculus Hippocastanum).