Page:Espinas - La Philosophie sociale du XVIIIe siècle et la Révolution.djvu/130

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avait été déjà dans bien des cas entamée par le pouvoir central (création d’offices nouveaux, taxes énormes réitérées pour rachat de ces créations, etc.) Elle se composait de deux parts : les maîtrises et jurandes qui s’achetaient et représentaient une valeur en argent aux mains des titulaires actuels, et les fonds communs, valeurs mobilières ou immobilières, appartenant à la corporation. L’institution était en pleine décadence ; mais tel était l’état du droit, qui à aucun point de vue ne pouvait être contesté. Le comité des contributions au sein de la Constituante s’inspira, pour réclamer un régime nouveau, des doctrines des Physiocrates ; il proclama la liberté de l’industrie et du commerce et soutint que le nombre des commerçants et des fabricants en chaque profession se mettrait naturellement d’accord avec les besoins des consommateurs. Doctrines respectables. Mais pour assurer à chacun dans l’avenir la propriété de son travail, le législateur méconnut étrangement les droits du travail passé et les principes juridiques les plus évidents. L’assemblée supprima les maîtrises et les jurandes ; elle promit aux titulaires de ces charges une indemnité des deux tiers de leur prix (40 millions) pourquoi des deux tiers ? – qui ne leur fut payée qu’en assignats ; et quant aux propriétés des corporations, elles furent confisquées au profit de l’Etat. Encore une expropriation ! À cette occasion se manifesta tout naturellement dans un journal la tendance à une réglementation socialiste de l’industrie qui devait s’accentuer plus tard au cours de la Révolution : on demanda qu’un minimum fût fixé pour les salaires et qu’il fût donné aux ouvriers a qui se seraient distingués par leur habileté et leur sagesse », « les moyens de s’établir pour leur compte. » Ce journal était l’Ami du Peuple, et l’auteur de l’article était Marat.

Les biens de l’Eglise étaient essentiellement collectifs.