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couronnés de fleurs apportant leurs tributs sur des troncs roulants ornés de lauriers. « Nous aimons être libres dans nos dons, fait-il dire aux riches, et notre générosité ne veut d’autre motif que la raison et l’amour de l’Etat. » « Ce que nous donnons est de bon cœur ; notre tribut n’est pas forcé ; il est fondé sur l’équité ainsi que sur la droite raison. » On sait que cette contribution patriotique avait produit avec peine 30 millions en 1792 ! Dès le début de la Révolution les impôts cessèrent de rentrer. « Les revenus de l’Etat sont anéantis, le Trésor est vide ; la force publique est sans ressort ! » s’écriait Mirabeau en septembre 1789. Il fallut, malgré les grandes espérances fondées sur la vente des biens nationaux, et au moins pour l’avenir, établir des impôts. En 1791, l’assemblée supprime définitivement les impôts directs sur les facultés individuelles. La capitation de l’ancien régime semble disparaître. Mais l’impôt sur les signes extérieurs du revenu réintroduit indirectement le principe de la progression, et substitue l’impôt personnel à l’impôt réel. Se fondant sur ce qu’on met une part d’autant plus forte de son revenu à son loyer qu’on est moins riche, la loi de janvier-février 1791 présumait un revenu double, triple, quadruple selon que les loyers étaient de 100 livres ou de 100 à 500, ou de 500 à 1,000 livres, et elle frappait ce revenu d’une taxe proportionnelle. Ce n’est pas là un impôt proportionnel véritable, c’est le frein demandé par Rousseau. C’est un impôt progressif de tendance. Tous les autres impôts de la Révolution l’ont été de fait.

Par l’aliénation des biens de l’Eglise, par cette première tentative pour restreindre au moyen de l’impôt l’accroissement des fortunes, la Constituante préparait le retour à l’égalité primitive. Elle travailla non moins consciemment à la même œuvre en proclamant les 8-15 avril 1791 le principe de l’égalité des partages dans les successions