Page:Esquiros - Les Hirondelles, 1834.djvu/160

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 154 —

Heureux qui n’a connu que son pauvre hameau,
Le toit de ses ayeux, le nid de sa colombe,
L’onde pure du lac et les fruits du rameau ;
Heureux qui vit paisible, et qui place sa tombe
Aux lieux où trembla son berceau !
 
Content de ses moissons et du peu qu’il espère,
Animant sous ses doigts la flûte sans accord,
Il s’assied sur le banc où s’asseyait son père,
Et fier du fruit fécond de son hymen prospère,
Berce sur un rameau son enfant qui s’endort.

Tranquille, il voit ses grains tomber sous la faucille,
Vieillit avec l’ormeau que ses mains ont planté ;
Et pareil à l’oiseau resté sous la charmille,
Il ne pleure jamais le toit de sa famille
Ni le pays qu’il a quitté !

Etranger, j’aime encore un beau ciel qui s’azure ;
Quand à mes yeux distraits des pleurs ont échappé,
J’aime à les voir tomber dans un ruisseau d’eau pure ;
Et mon cœur désormais s’attache à la nature
Comme au seul être enfin qui ne l’a pas trompé.