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mot à présent sur l’homme. Différent en cela de la plupart des inventeurs et des utopistes, Gall entendait assez bien la raillerie sur ses doctrines. Il aimait l’esprit ; même à ses dépens. Sa philosophie eut comme celle de Socrate l’honneur d’être représentée sur la scène et d’exciter la bonne humeur du parterre[1]. Ce ne fut pas (sans parler de sa tête) le seul trait de ressemblance ; que Gall eût dans sa vie avec le philosophe grec. Étant à Strasbourg, Gall fit une très grave maladie, à laquelle il manqua de succomber. Une jeune femme, attachée à la maison où il était, lui prodigua les soins d’une complaisance infinie. Entraîné par son bon cœur, il en devint amoureux, et, de retour à la santé, il l’épousa. Notre philosophe ne fut pas heureux dans cette union. Sa femme était une seconde Xantippe, pour le caractère emporté, violent : elle manquait aussi d’éducation. Il paraît que dans les commencemens, notre sage essuyait les bourrasques de sa disgracieuse compagne, avec la bonhomie et le sang-froid de Socrate, quand il reçut le pot d’eau sale sur la tête. S’il la quitta ensuite, c’est que la place n’était plus tenable. Ne pouvant trouver de repos dans cet intérieur si tempétueux, Gall assura une pension viagère à sa mauvaise femme, et s’en alla vivre ailleurs.

Je serai indiscret, pour Gall, comme il l’était lui-

  1. « Gall, dit le docteur Fossati, avait vécu quelque temps, à Berlin, avec le célèbre Kotsbue. Le poète profita de l’occasion pour apprendre de Gall les mots techniques de la doctrine, et pour connaître les idées et les principes qui prêtaient le plus au ridicule. Il composa la pièce la Crânomanie, qui fut immédiatement jouée sur le théâtre de Berlin. Gall assista à la première représentation, et se mit à rire comme les autres. »