Page:Esquiros - Paris ou les sciences, tome 1.djvu/394

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reuse, dont Rubens nous a laissé le modèle dans ses tableaux : le maître néerlandais avait vécu fort longtemps en Italie, il avait eu sous les yeux le même ciel et les mêmes femmes que Raphaël. C’est donc toujours par l’organisation intime du peintre, qu’il faut s’expliquer cette force indomptable, dont l’effet est de modifier la nature et de l’accommoder au caractère de l’homme.

Le docteur Spurzheim avait rencontré de son côté un curieux exemple de l’indépendance de nos facultés, sur un jeune Écossais, nommée Jacques Mitchel. Cet individu était né sourd-muet et aveugle. Privé des deux principaux sens de relation, un tel être se trouvait infiniment peu en commerce avec le monde extérieur. D’après les idées de Condillac, on l’eût préjugé jugé idiot. Il n’en était rien. Jacques Mitchel donnait, au contraire, des signes nombreux d’intelligence. Cet aveugle-né avait le sens de la construction ; on le vit plus d’une fois bâtir, en manière de jeu, des cabanes avec des morceaux de tourbe dans lesquels il laissait des ouvertures pour imiter des fenêtres. Toutes ses actions indiquaient du raisonnement et des connaissances naturelles. Un jour il rencontre, sur la route, un homme à cheval. Mitchel s’arrête ; après un moment de réflexion, il touche le cheval, parait l’avoir reconnu et à l’instant fait signe au cavalier de descendre. Celui-ci obéit étonné. Mitchel conduit le cheval à l’écurie, lui ôte la selle et la bride, lui donne de l’avoine à manger, se retire, ferme la porte, et met la clé dans sa poche. Ce cheval avait été acheté à la mère du jeune Mitchel quelques semaines aupara-