Page:Esquiros - Paris ou les sciences, tome 1.djvu/400

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Il serait impossible de calculer en détail les mille et une conditions qui modifient la tendance naturelle de chaque homme. Nous savons tous que l’esprit d’un auteur dépend à certains jours de la pluie ou du soleil et de toute autre circonstance aussi mesquine. Le bourdonnement d’une mouche empêchait Pascal de réfléchir. Il est donc évident que le rôle intellectuel de chaque individu ne saurait se reconnaître toujours, d’une manière absolue, par les signes de la tête et encore moins par la forme empreinte au cerveau de l’enfant. La méthode qui consiste à rapprocher le crâne des hommes vivans du crâne des hommes célèbres qui ont vécu, pour y trouver des points de comparaison et en tirer des conjectures, est encore plus vicieuse. D’abord il n’y a pas deux cerveaux conformés exactement de la même manière, et les moindres différences sur quelques organes retentissent, en vertu d’une grande loi de solidarité, sur tout l’ensemble de l’organisation. Ensuite, il faut tenir compte de ce fait important, que ces hommes-là ont vécu dans un autre siècle que le nôtre et sous d’autres formes sociales. Qui peut fixer au juste où s’arrête l’influence de son temps sur le génie d’un poète, d’un orateur, d’un philosophe ? Qui peut dire ce que seraient de nos jours Corneille, Bossuet, Descartes ? Il est hors de doute que des époques différentes donneraient aux mêmes facultés des impulsions tout-à-fait imprévues. Sans absorber précisément la nature de l’individu mort, le mouvement de la société, qui varie et se renouvelle de siècle en siècle, lui imprimerait à coup sûr, si cet individu-là