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Page:Etienne-Gabriel Morelly - Code De La Nature.djvu/10

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serait-il pas dans la république pensante ? que deviendraient alors les sublimes abstractions, les profonds raisonnements, les merveilleuses conjectures sur l’être en général en tant qu’il est séparé de toute matière ? Les fameux Traités de Métaphysique d’Aristote, de Descartes, Malebranche, Clarke, Locke, Leibnitz, Condillac, etc, rentreraient comme les tourbillons dans le chaos. » (Le Voyageur philosophe, in-12, 1761, tom. II, pag. 197).

Ce serait ici le lieu de préciser jusqu’à quel point l’attraction, qui règne en souveraine dans l’ordre de la nature, doit étendre son empire dans l’ordre social qui repose tout entier sur la justice, et d’assigner les circonstances dans lesquelles ce qui est juste peut n’être pas désiré. Il y aurait à établir, entre le monde physique et le monde social, des différences profondes que Morelly et Charles Fourier ont négligé de faire ressortir ; mais ces distinctions nous mèneraient trop loin. Quelque opinion qu’on ait, au reste, sur la nature des phénomènes moraux ; que l’attraction soit ou non le principe générateur de nos actions, la société doit toujours rendre l’individu responsable de toute action contraire à l’intérêt social, qui ne peut être, on le sait fort bien, que l’intérêt du plus grand nombre. Cet intérêt a déjà été consulté quant à l’emploi de quelques uns de nos moyens d’action ; car nous ne voulons pas non plus nier que la plupart de nos lois actuelles ne soient socialement justes. Ces lois imparfaites n’ont pas sans doute détruit toutes les causes de lutte ; mais il n’est plus ou moins permis aux individus d’user envers et contre tous de la supériorité de leur force physique, s’il leur est encore permis d’abuser de la supériorité de leur fortune. La raison du plus fort n’est donc pas toujours la meilleure. Tout n’est pas livré à l’empire de la ruse et de la violence. On a quelquefois appliqué les principes de justice qui doivent présider à tout accord