Page:Eugène Le Roy - Au pays des pierres, 1906.djvu/53

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meilleure danseuse de congo de Montglat. Maintenant, sa fille l’avait remplacée. Le Breton, qui ne connaissait pas cette danse, fut obligé de se contenter de la voir faire, mais vraiment cela en valait la peine, aussi faisait-on cercle pour la regarder.

Elle était en robe de mousseline blanche, la même qu’elle portait à la procession de la Notre-Dame d’août, y ayant ajouté seulement une ceinture de ruban rouge, dont les bouts noués sur le côté flottaient le long de la jupe. Rien sur la tête ; elle était comme casquée de ses beaux cheveux noirs, massés derrière la tête, et maintenus par un haut peigne à chignon qui semblait un cimier.

Tenant sa robe entre ses doigts, Maurette s’avançait, les yeux baissés, vers son danseur, puis elle s’arrêtait, cambrait la taille, rejetait la tête en arrière et marquait un temps d’arrêt pendant que le cavalier tourbillonnait autour d’elle. Ensuite elle se remettait en mouvement, faisait des pas, fuyait, revenait et pirouettait sur elle-même avec une gracieuse torsion de reins qui faisait coller la robe sur ses hanches. Après, ce furent d’autres attitudes, des mouvements rythmés et souples qui révélaient des formes de déesse. Enfin, comme saisie par le dieu de la danse, aux yeux ravis et jaloux de Kérado, la voici qui s’élance, multiplie ses pas cadencés, arrondit les bras au-dessus de sa tête, fait claquer ses doigts comme des castagnettes, ploie sur ses flancs, se meut, se balance et se tord avec la fougue chaste de la jeunesse exubérante… Puis cette ardeur tombe