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Page:Eugène Le Roy - Jacquou le Croquant.djvu/158

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IV

Le matin, à mon réveil, je fus tout étonné de me trouver dans un grenier à foin ; mais bientôt la mémoire me revint. Je regardai autour de moi : la vieille était partie, mais, se doutant que j’aurais faim, elle m’avait laissé un bon morceau de pain. Mon ventre criait, comme ça devait être depuis deux jours que je n’avais rien mangé. Pourtant, quoique ce pain fût de pur froment, qu’il eût l’air bien propre, je sentais une grande répugnance à y toucher. Chez nous autres, aussi pauvres que soient les gens, ils ont horreur du pain de l’aumône. On dit communément qu’un bissac bien promené nourrit son homme, mais avec ça, le plus chétif paysan, dans la plus noire misère, s’estime encore heureux de n’en être pas réduit là, et regarde avec