Page:Eugène Le Roy - L’Année rustique en Périgord, 1921.djvu/53

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en patois, le chardon épineux, le thlaspi à l’odeur alliacée, toutes mauvaises herbes qui foisonnent dans les moissons, et même la belle amaranthe, queue de renard à la pourpre vineuse, ornement des jardins rustiques, mais qui, dans les blés, « mange » la terre.

Après cela, il faut faire les dernières coupes de luzerne et les regains, avant de mettre les bêtes aumailles dans les prés. Il faut encore semer les trèfles incarnats, lever la récolte de la St-Michel, haricots, blé d’Espagne, et arracher les pommes de terre.

En ce mois si occupé, il y a pourtant pour certains un petit répit, c’est celui de la « Gerbe-baude », comme qui dirait la belle, la joyeuse gerbe ; ou bien du « Beau-blé » selon quelques-uns.

C’est fête chez les métayers ce jour-là. On mange de la bonne soupe grasse faite avec une poule et un lopin de bœuf ou de velle, selon la région ; puis de la fricassée de poulet, et de la daube, plat obligé en cette occasion. Et pour se revancher de l’eau qu’on a bue toute l’année, surtout pendant les métives et les battaisons, on boit de grands coups de vin.

C’est étonnant comme nos gens de campagne s’accommodent au temps et aux circonstances. Toute l’année ils vivent de peu : de la soupe maigre, des haricots, des pommes de terre, des « millassous », des « miques » et, dans beaucoup de contrées du Périgord, des châtaignes à la saison ; voilà leur menu. Les plus pauvres même se contentent parfois d’une mauvaise soupe et d’une frotte à l’ail. Mais vienne le carnaval ou la « Gerbe-baude »,