Page:Eugène Le Roy - L’Ennemi de la mort.djvu/54

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Il feuilleta ce cahier jauni, d’une vieille écriture française, droite, ferme et précise, et il employa toute la fin de l’après-midi à cette lecture.

Sur le soir, le soleil couchant, qui donnait dans les vitres de la fenêtre et dessinait sur la table les barreaux de fer dont elle était défendue, le fit lever de son fauteuil et aller dans la cour. Dehors, à l’Ouest, l’horizon était incendié de lueurs rougeoyantes qui jaillissaient en éventail derrière la cime des coteaux boisés. L’humidité dont l’air était auparavant saturé s’était évanouie, et la pierre du seuil de la cuisine, baromètre naturel qui se mouillait à l’approche des temps pluvieux, s’était séchée.

« Nous allons avoir un été de la Saint-Martin précoce », pensa Daniel.

Et, en effet, les jours suivants, comme il arrive parfois au commencement de l’automne, ce fut un retour des chaleurs caniculaires. Cependant, malgré le beau soleil, Jannic eut un accès de fièvre qui rappela au maître sa promesse. Le lendemain, alors qu’il se disposait à s’en aller querir du quinquina, il trouva dans la cuisine un vieux homme tout dépenaillé qu’il reconnut aussitôt : c’était Férigonde, dit Gondet, le « médecin des fièvres ».

— Il n’est pas besoin de drogues, disait le bonhomme à Jannic rencogné dans l’âtre.

— Pas de drogues… mais vous avez des remèdes pour la fièvre ? intervint Daniel.

— Beaucoup.

— Et quels ?

— Je lui attacherai des herbes sur le poignet gauche…

— Mais, interrompit Jannic, vous savez bien que les herbes n’y firent rien, antan !