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Page:Eugène Le Roy - La Damnation de Saint Guynefort.djvu/10

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— Oh ! je ne recherche point les biens périssables de ce monde terrien ! — interrompit humblement Guynefort.

— En Dieu, je le crois, saint homme ! Mais prenez garde pourtant, qu’il faut soutenir le corps afin qu’il puisse vaquer au service du Seigneur, et, pour ce faire, manger et boire… conséquemment avoir un bénéfice…

— Peu me suffira, — dit le pèlerin.

— Hé bien, — dit à son tour l’écuyer, — puisque vous êtes clerc, pourquoi ne seriez-vous pas le curé de notre paroisse, où Dieu semble vous avoir conduit comme par la main ? Elle est petite, mais néanmoins, en dîmes, rentes en nature et en deniers, oblations et menues offrandes, plus que suffisante pour entretenir en bonne santé corporelle un honnête curé, et lui fournir par surcroît, les moyens de secourir les pauvres de Notre-Seigneur Jésus-Christ.

— Je serais heureux de rester parmi de bons christians comme vous êtes, puisque Dieu a voulu que j’y sois venu, — dit le pèlerin ; — cependant donnez-moi le loisir d’y penser cette nuit.

— Bien volontiers, — répondirent ensemble les deux époux.

Cette nuit-là, le traversin de Guynefort en vit de dures. À plusieurs reprises, la damoiselle Sybille, réveillée par le bruit, poussait son mari du coude :

— Ce pauvre homme se tuera, ainsi faisant !

— Espérons que non, m’amie ! il fait son devoir, imitons-le.

À son lever, le lendemain, Guynefort déclara que Dieu l’avait inspiré, et qu’il se rendait au désir de ses hôtes. Seulement il y avait la question du bénéfice… Quel était le collateur ?

— Comme dans un grand nombre de paroisses tenues en bénéfice séculier, le curé doit être, selon l’antique usage, choisi par les ouailles, —