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Page:Eugène Le Roy - La Damnation de Saint Guynefort.djvu/44

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mesure qu’ils descendaient, la chaleur devenait plus forte, mais la transition se faisant insensiblement, Guynefort n’en était point incommodé. Enfin tant marchèrent et descendirent le défunt curé et ses compagnons, qu’ils se trouvèrent en une belle et spacieuse salle, au fond de laquelle sur une estrade, un gros homme cornu comme feu Moïse, était assis en une simple chaire de bois qu’eut dédaignée un évêque. Ce personnage d’aspect jovial, était entouré de courtisans cornus aussi, mais plus petitement, comme de bon juste.

Au bas de l’estrade recouverte d’un tapis fait de peaux de papes, tannées selon les bonnes méthodes, tous les trois s’arrêtèrent, et l’un des estafiers dit :

— Sire, voici un curé que nous vous amenons.

— Encore un ! — s’écria Satanas, — je vais être obligé de faire agrandir l’enfer pour loger tous ces clercs ! Et pourquoi viens-tu ici ? continua-t-il en s’adressant à Guynefort.

— C’est qu’on ne m’a pas voulu ailleurs.

— Et tu viens au refugium peccatorum, curé…

— Voire ! Je ne suis point clerc.

— Alors que chante Garifel ?

— J’étais curé pour rire…… ayant hérité des papiers et lettres de prêtrise d’un mien camarade, mort du feu St-Antoine.

— Et tu en as fait les fonctions ?

— Oui, et je vous ai envoyé bien des gens !

— Comment ça ?

— Comme je n’étais pas prêtre, non plus que vous, ceux que je mariais vivaient en état de concubinage ; les enfants que je baptisais restaient entachés du péché d’Adam ; les mourants que j’absolvais n’étaient point absous… et tout ce monde venait droit ici !

Et lors, Guynefort raconta par le menu toute son histoire : la résurrection de la mouche,